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Un début de moisson plein de doutes en Eure-et-Loir

Depuis le 22 juin, la récolte bat son plein en Eure-et-Loir. L’occasion de faire un tour de moissonneuse avec Cyril Lucas, a Charonville.

Ce n’est pas ce qu’ils ont semé mais les agriculteurs euréliens font surtout une belle moisson de doutes en ce début de récolte. Du reste, après les difficultés de semis des céréales d’hiver, puis celles des cultures de printemps, les invasions de ravageurs ou côté météo : des coups de froid, des coups de chaud, trop de sec et des abats d’eau, on le comprend aisément. D’autant que le spectre de 2016 plane encore au-dessus de la plaine...

Pour autant, la moisson est lancée, un moment particulier de la campagne où l’on s’affaire sans attendre, tout en rêvant de la meilleure récolte possible. Celle qui saurait rendre justice à leur travail.

Aussi, pour rendre compte de ce moment, nous rencontrons — par hasard —, Cyril Lucas. Flanqué de son fils et de son oncle, il bat une parcelle d’orge brassicole le 26 juin à Charonville : « C’est de l’Etincel, précise-t-il, mais je ne sais pas vraiment ce que ça donne, ma machine est toute neuve et elle n’est pas étalonnée, d’ailleurs quelqu’un doit venir pour ça tout à l’heure. En tout cas, hier, j’ai battu de la Faro juste en face et ça a donné 76 quintaux, la qualité était bonne ».

Du haut de la cabine de la Claas Lexion 740, toute neuve donc, la parcelle est vraiment belle : « j’ai fait ce qu’il fallait pour que ce soit bien. Ici, les bonnes années, on peut avoir jusqu’à 95 quintaux mais là, on devrait être plus proche de 70, on verra... ».

L’exploitant semble pourtant rassuré : « on entend des gens parler de 50 quintaux, voire moins. Vous devriez allez voir chez quelqu’un qui a de la jaunisse... Donc, si on fait 70 ce sera pas si mal... J’ai 36 hectares d’orges à récolter pour moi et au total 72 avec celles des voisins », sur des parcelles ici et là...

Le confort, le silence et la fraîcheur de la cabine, facilitent la conversation. Sur la commercialisation : « quand le prix est suffisant, à mon avis il faut vendre, sans forcément attendre que cela monte. Cette année, j’ai engagé 50 % de ma récolte mais ce serait risqué d’en engager plus ».

Sur les incendies : « il y a eu cinq ou six départs hier, c’est une préoccupation forcément. Nous avons mis un extincteur dans chaque machine et nous aimerions bien trouver une tonne à eau d’occasion. Mais c’est en hiver qu’il faut s’occuper de ce genre de chose... Je viens de recevoir un mail de la préfecture et de la Chambre qui nous proposent d’être volontaires pour pouvoir intervenir mais je ne sais pas, il faudrait que nous soyons très nombreux... ». L’idée fait son chemin.

Car Cyril Lucas est un agriculteur engagé, dans la vie sociale d’abord : « je suis maire de ma commune, je faisais déjà partie du conseil municipal. Il y a eu une opportunité... Il faut qu’il y ait des agriculteurs dans les mairies », souligne-t-il et ajoute qu’il a été chez Jeunes agriculteurs : « je suis à la Fédé maintenant. Il faut s’engager dans le syndicalisme quand on est agriculteur, on sait à quelles portes frapper, on rencontre du monde et on sait qui on est. Rester seul dans son coin pour un agriculteur, ce n’est pas bon ».

Selon lui : « Nous avons un beau métier mais c’est de plus en plus compliqué. On nous retire nos moyens de production et on voit ce que ça donne maintenant. Et avec tout ce qui est dit dans les médias, les rapports avec les gens sont difficiles. Je pense qu’il faut communiquer avec ses voisins qui ne sont pas agriculteurs. En tout cas c’est ce que j’essaye de faire ».

En attendant, la machine avance, la récolte avec et la trémie se remplit vite : « soit c’est la machine qui est trop grosse, soit les remorques sont trop petites », s’amuse-t-il. Il arrête la moissonneuse au bout de la parcelle, le tracteur revient. Avec son oncle ils se penchent sur le ticket du silo : « Alors ? ». Finalement, ce n’est pas si mauvais...

Hervé Colin

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