« On sent que les jeunes ont envie de bouger »
Nous avons rencontré le président de Jeunes agriculteurs d’Eure-et-Loir, Théophile Pelé, alors que vient de se terminer le congrès national du syndicat qui s’est déroulé au Mans (Sarthe) du 16 au 18 juin.
Horizons : Quels sentiments animent Jeunes agriculteurs d’Eure-et-Loir alors que les crises s’accumulent dans tous les secteurs ?
Théophile Pelé : Pour ma part, je suis un peu déçu. Au niveau du département et de la région, nous nous sommes mobilisés à plusieurs reprises pour défendre nos intérêts au moment de la mise en place de la réforme de la Pac, par exemple. Or, rien n’a suivi au niveau national. Nous avons fait des réunions avec les adhérents sur tous ces problèmes et nous sommes déçus qu’il n’y ait pas de réaction. Pourquoi n’y a-t-il pas eu de manifestations contre l’arrêté abeille ou l’arrêté air ? De la même façon, je n’entends pas beaucoup parler du traité commercial transatlantique (Tafta), alors que clairement, nous ne pouvons pas être pour.
Avez-vous réussi à faire passer ces messages au congrès national au Mans (Sarthe) ?
J’ai pris la parole à plusieurs reprises. Au sujet de la communication par exemple, quand Jean-Pierre Pernaud (le présentateur du treize heures sur TF1, ndlr) ou l’émission Complément d’enquête (France télévision) stigmatisent la profession agricole en énonçant des contre-vérités, j’aurais aimé des réactions, mais j’ai compris que l’on ne nous accordait pas les droits de réponse réclamés... Il faudrait des ressources administratives dédiées pour réagir tout de suite... Par ailleurs, j’ai demandé la réunion de la session « montagne » en Beauce en 2016. Je l’ai proposée sur le ton de la blague, mais je pense que le message est passé...
Au cours du congrès, avez-vous réussi à interpeller le ministre, Stéphane Le Foll ?
De notre côté, nous voulions tapisser le congrès de pancartes « Le Foll t’es zéro », mais le bureau national a eu l’idée d’écrire une complainte que le secrétaire général, Florent Dornier (Doubs), a interprétée en s’accompagnant à l’accordéon. Le ministre est devenu blanc. Il ne quittait pas le chanteur des yeux et quand il s’est retourné, tout le monde brandissait en silence une pancarte avec marqué « Help » dessus. Je crois qu’il a compris que si ça ne bougeait pas, ça allait être chaud.
Et vous avez réussi à rencontrer le ministre en personne ?
Oui, en fait, la partie réservée aux questions au ministre a été écourtée, mais Antoine Thiboust (le vice-président en charge de l’installation, ndlr) avait une question à lui poser au sujet de l’installation sur les bassins de captage, rendue presque impossible compte tenu des règles qui changent constamment. Nous sommes tombés sur lui par hasard et lui avons posé notre question. Mais il nous a répondu plutôt comme un porte-parole, que tout allait s’arranger...
Au final, un congrès plutôt positif ? `
Oui, le congrès était intéressant. L’équipe nationale a du répondant, elle maîtrise les dossiers. De mon côté, je crois que j’ai fait mon boulot de président de département, au congrès. En revanche, c’est sûr que je n’aurais pas forcément les épaules pour tenir un congrès comme ça devant quatre cents personnes. Il faut être solide et avoir la tête bien posée.
Vous arrivez à mi-mandat, quel bilan tirez-vous de l’exercice ?
Je suis plutôt content. Nous avons une équipe dynamique dans le bureau et tout le monde participe. Les choses avancent. En matière de communication, ça marche bien. Il y a des investissements sur plusieurs dossiers, comme l’environnement, le plan de chasse, ou les services aux adhérents. Yves-Marie Fillon (le secrétaire général du syndicat) fait du bon travail sur les cantons qu’il visite régulièrement. Et surtout, syndicalement, nous sommes présents.
Comment sentez-vous les jeunes sur le terrain ?
On sent qu’ils ont envie de bouger, et dans d’autres départements aussi. Les problèmes liés à l’installation toujours pas résolus, les changements de critères dans les MAE, c’est pas du boulot. J’en arrive à me demander s’il y aura un jour un peu de bon sens dans tout ça. C’est dingue, mais il faut crier pour obtenir des choses normales. Et j’espère que nous allons faire une bonne moisson, sinon, j’ai bien peur que ça pète fort en septembre.