« Nos décideurs se fichent de nous ! »
Betteravier à Villexanton (Loir-et-Cher) pour le compte de Tereos, Bertrand Menon accuse une perte de rendement de 50 % à cause de la jaunisse.

Planteur de betteraves à Villexanton sur 38 ha et conseiller de la région sud de Tereos, Bertrand Menon a perdu 50 % de sa récolte à cause de la jaunisse. Le 21 octobre, le professionnel avait arraché la moitié de ses surfaces et ses betteraves devaient prendre la direction de la sucrerie d’Artenay (Loiret) à la fin de la semaine.
« Je ne m’attends pas à un taux de sucre élevé, dit-il. Les feuilles jaunes ont disparu et la betterave en a refait des nouvelles, au détriment des racines. Or ces dernières contiennent le sucre ».
Notre interlocuteur poursuit : « Nous avions tout pour bien faire : précocité d’implantation et pression maladie contenue ».
Le potentiel de rendement de Bertrand Menon, planteur depuis 2014, s’élève à 120 t/ha à 16 °. Celui-ci déclare : « Les décisions prises par nos dirigeants, notamment l’interdiction des néonicotinoïdes en traitement de semences, nuisent à la production. Les payeurs ne sont pas les élus mais les agriculteurs ! ».
Il estime ses pertes à 1 500 euros par hectare. « Cela impactera ma trésorerie, explique-t-il. Je demanderai un crédit à court terme à ma banque. La situation des céréales est meilleure mais il reste peu de volumes à vendre ». Notons que l’intéressé dispose d’une SAU de 155 ha.
Bertrand Menon s’est lancé dans la betterave pour « diversifier [ son ] exploitation » et parce que « le prix du sucre n’est pas corrélé à celui des céréales ».
La récente autorisation des néonicotinoïdes en traitement de semences pour trois ans à partir de 2021 suscite un espoir chez le planteur. « Mais que ferons-nous après ?, s’interroge-t-il. Le pas de temps agricole n’est pas le pas de temps politique. Nos décideurs se fichent de nous ! On importe des produits contenant des substances que nous n’avons pas le droit d’utiliser chez nous ! ».
Le planteur est engagé avec Tereos jusqu’en 2023. « Je souhaite continuer, dit-il. Mais si les années futures ne sont pas bonnes, cela remettra en cause la filière. Les deux dernières campagnes n’étaient pas bonnes non plus ».
Bertrand Menon poursuit : « Je perds de l’argent à titre personnel et au niveau de la coopérative. L’outil est calibré pour un seuil de rentabilité. Cependant, le groupe est solide. Nous avons tout pour produire du sucre en France. Ce serait dommage de l’importer ».
Olivier Joly