L’innovation agricole passera par le numérique
Portail de données agricoles, structuration de la recherche en agriculture numérique, création de « laboratoires territoriaux » : le rapport gouvernemental Agriculture-Innovation 2025 fait la part belle au numérique. Le rapport Agriculture-Innovation 2025, qui propose trente projets « pour une agriculture compétitive et respectueuse de l’environnement », était présenté le 22 octobre au ministère de l’Agriculture. Parmi neuf axes en faveur d’une agriculture innovante, on trouve le volet « numérique ». Le rapport suggère deux projets « pour que l’agriculture numérique puisse contribuer de façon significative à la mutation de l’agriculture français tout en profitant aux acteurs nationaux des technologies de l’information et de la communication. »$ D’abord, le lancement d’un portail Internet qui mettra à disposition des données agricoles publiques ou privées (venant d’agriculteurs ou d’autres acteurs), sanitaires, économiques, pédoclimatiques, etc. L’objectif est de stocker et utiliser les données massives produites en agriculture pour créer de nouveaux savoirs et de nouveaux services. Le but est aussi de maîtriser ces données. C’est ce que souligne Axelle Lemaire, la secrétaire d’Etat chargée du Numérique : « Les données sont la valeur économique du 21e siècle. Des géants industriels en ont compris l’intérêt, comme Monsanto. Il est essentiel qu’elle ne soient pas source de dépossession, mais un moyen d’obtenir une souveraineté économique. »
Ce portail devrait être mis en oeuvre « dès 2017 », l’ambition est de le diffuser à d’autres pays d’Europe en 2018. Le second projet consiste à structurer la recherche sur le numérique en agriculture. Un centre interdisciplinaire de recherche dédié au sujet va être créé. Un programme de recherche va être lancé pour encourager le développement de nouveaux modèles numériques de fonctionnement des agrosystèmes. Le plan prévoit aussi de soutenir le développement de capteurs et de réseaux connectés : l’idée est de présenter en 2020 des « prototypes de capteurs de détection précoce de l’état des écosystèmes » (qualité sanitaire des plantes, des animaux, des sols…) et une offre d’objets communicants pour les cultures et l’élevage. Axelle Lemaire a évoqué un autre projet du rapport Agriculture-Innovation 2025 : la création de « laboratoires territoriaux ». Elle précise : « On part de l’idée d’innovation ouverte : il n’y a plus la ville face à la campagne, l’agriculture face à l’entreprise. Il faut décloisonner, avec un travail horizontal et collaboratif ». Un appel à projet va être lancé en 2016 pour créer une douzaine de ces « living labs », représentatifs de l’agriculture et des territoires française - grandes cultures, arboriculture et viticulture, élevage élevage intensif, élevage extensif, agriculture périurbaine, forêt…-. Au sein de ce réseau, les innovations seront testées, encouragées, analysées, avant d’être diffusées. La secrétaire d’Etat précise : « ces laboratoires s’intégreront dans un projet d’Agri tech à la française, qui prendra sa place dans la French tech* : ce sont les acteurs économiques qui créent des solutions. » Axelle Lemaire a terminé son intervention en soulignant « l’importance de marier agriculture et numérique » : « On a a une image fausse. Le monde agricole français est certainement plus connecté que de nombreux secteurs ! » *Label porté par le ministère de l’Economie pour mettre en avant les start-up françaises à l’étranger. Le rapport Agriculture-Innovation 2025 Le rapport Agriculture-Innovation 2025 a été rédigé par Pierre Pringuet (président du conseil d’administration d’Agroparistech), François Houllier (PDG de l’Inra), Jean-Marc Bournigal (président de l’Irstea), et Philippe Lecouvey (directeur de l’Acta) à la demande du gouvernement. Il a fait l’objet de consultations auprès des professionnels de l’agriculture, de l’innovation, de la recherche et du développement. Le rapport propose trente projets, recouvrant les domaines de l’agro-écologie, de la bioéconomie, de l’agriculture numérique, de la robotique, de la génétique, des biotechnologies, du biocontrôle, de l’innovation ouverte, de l’économie et de la formation. Pour Stéphane Le Foll, il s’agit de « la dernière brique du projet de l’agro-écologie en France. » Le ministre de l’Agriculture a annoncé qu’un comité de pilotage allait être constitué pour guider les projets proposés, et que les axes de financement seront détaillés lors d’un colloque qui se tiendra avant le Salon de l’agriculture.