La FNSEA 45 lance un cri d'alarme au préfet du Loiret
Les représentants du monde agricole et des chasseurs réunis autour du préfet du Loiret pour résoudre collectivement le problème des dégâts de gibier.
Depuis cinq ans, le Loiret fait face à une augmentation exponentielle du nombre de dégâts de gibier. Au nord comme au sud du département, les champs sont retournés, les semis à refaire, les prairies anéanties.
Ces dégâts coûtent aux agriculteurs et aux chasseurs, cassent le matériel, minent le moral des exploitants qui voient leurs récoltes détruites. La densité de population et le volume des dégâts menacent aujourd'hui l'existence même de l'agriculture dans certains territoires, comme notamment dans les secteurs de Lorris et Montereau, où les agriculteurs sont obligés de refaire trois à quatre semis de maïs chaque année.
Parce que ce sujet est complexe et affole la plaine, la FNSEA du Loiret a organisé samedi dernier à Saint-Aignan-le-Jaillard, une visite sur le terrain en présence du préfet du Loiret, Pierre Pouëssel.
La rencontre s'est tenue sur l'exploitation de Thierry Daubigny, durement impactée par les dégâts de sangliers au printemps. Étaient également conviés, la DDT, la Fédération des chasseurs, des louvetiers ainsi qu'une dizaine d'agriculteurs venus témoigner des conséquences des dégâts sur leur exploitation.
« Malgré les 20 000 sangliers prélevés chaque année dans le Loiret, et les différentes actions déjà mises en place (réactivité de l'administration vis-à-vis des demandes de battues administratives, protocole Briare maintenu en avril, chasse autorisée à partir de juin, mise en place de tirs de nuit autour des engins de récolte, etc.), les populations de sangliers continuent leur expansion, à cause notamment des chasses privées qui ne respectent pas leurs devoirs de chasse », a introduit Patrick Langlois, président de la FNSEA 45 et responsable du dossier dégâts de gibier.
Il a poursuivi : « Si le monde agricole souhaite conserver des liens forts avec la Fédération des chasseurs, il en revient au préfet d'appuyer sur le bouton pour obliger les propriétaires privés à chasser au minimum une fois par mois. Dans certains secteurs, la cocotte-minute est prête à exploser ! ».
Et c'est sans oublier les conséquences dramatiques des accidents de la route, les contraintes et les coûts exorbitants d'entretien des clôtures de protection, et les risques sanitaires tels que la peste porcine africaine (PPA).
Patrick Langlois a expliqué : « La PPA, véhiculée par les sangliers, est à nos portes et vient d'arriver en Allemagne. Je suis d'ailleurs surpris qu'elle ne soit pas encore arrivée en France. Quand on sait qu'un porc mange 2 à 3 kg de céréales par jour, si la PPA arrive en France, c'est donc l'ensemble de la filière agricole qui va être impactée ».
Pour Thierry Daubigny, le problème des sangliers est présent de début janvier jusqu'aux récoltes.
« Dès le 5 janvier, 5 ha de blé sur les 20 semés étaient déjà détruits. En vingt ans, sur 110 ha de maïs cultivés, j'ai dû passer de 20 ha de clôtures à 90 ha, et cette année 10 ha de maïs ont été détruits dès les semis. Je suis d'ailleurs contraint tous les samedis l'été de solliciter une équipe de chasseurs pour protéger mes cultures de maïs. Il faudrait que je puisse protéger mes parcelles de semis 24 h/24, chose qu'un louvetier ne peut pas réaliser », a-t-il témoigné.
Les attentes des agriculteurs vis-à-vis des autorités publiques sont fortes, comme l'a exposé Patrick Langlois : « Nous attendons plus d'efficacité et des outils supplémentaires de la part des autorités. Concernant les agriculteurs qui chassent dans la période estivale, les bracelets de sangliers doivent être gratuits car la chasse se fait uniquement pour protéger les cultures. Un autre outil à expérimenter est le piégeage des sangliers ».
Pour Arnaud Jousse, agriculteur à Varennes-Chaingy, les moyens utilisés ne sont clairement pas à la hauteur des résultats. Il s'est ainsi adressé au préfet : « On perd 200 à 300 euros de l'hectare. Nous sommes habitués à travailler avec la nature, mais nous sommes arrivés à un niveau de dégâts qui n'est plus acceptable. Certaines propriétés ne font pas leur boulot de régulation. J'ai le sentiment aujourd'hui de travailler dans l'indifférence totale, bien que je tire depuis des années la sonnette d'alarme. Il faut qu'un arbitrage se fasse et les actions mises en place doivent s'articuler autour d'objectifs et d'indicateurs de résultats ».
Même constat pour Gilles Noël, éleveur dans le secteur de Montereau, qui a été contraint de refaire ses prairies et d'utiliser des grands moyens mécaniques pour refaire ses fossés, détruits par les sangliers.
Le président de la Fédération des chasseurs du Loiret, Alain Machenin, a pu partager également une vive inquiétude et sa volonté d'ouverture vis-à-vis de toute forme de régulation des sangliers.
« Je reconnais qu'il y a des propriétaires qui cultivent les sangliers et c'est regrettable. Il faut mettre en place des actions fortes sur certaines communes pour sensibiliser les chasseurs qui ne respectent pas les consignes de notre fédération. Les chasseurs doivent assumer leur devoir de régulation des populations de sangliers », a-t-il affirmé.
Face à ce constat alarmant et aux réactions à vif des participants, le préfet a su faire part d'une volonté de soutien nécessaire en déclarant : « Il faut que l'on réfléchisse à de nouveaux moyens d'action pour limiter les effets des sangliers sur les semis. Le piégeage existe dans d'autres départements, comme celui de l'Hérault d'où je viens. Il peut être un instrument à utiliser. Je me réjouis que chasseurs, administration et monde agricole soient unis. Il est important de bien uniformiser nos positions avec les départements limitrophes pour être plus efficaces ».
Si de nombreuses pistes d'actions ont pu être soulevées, tous ont pu rappeler l'importance que les agriculteurs fassent remonter à la Fédération des chasseurs leurs problématiques de dégâts de gibier.
Ces échanges auront permis plus que jamais de souligner la nécessité qu'agriculteurs, chasseurs et administration unissent leurs forces pour enrayer l'expansion du sanglier, comme l'a conclu Jean-Louis Lefaucheux, secrétaire général de la FNSEA 45 : « Les relations entre chasseurs et agriculteurs ont toujours existé, il faudrait que l'on puisse continuer à exercer notre métier sur notre territoire. De nombreux exploitants agricoles ne sont pas propriétaires de leur foncier et gardent le silence. L'État est un arbitre et doit agir en conséquence en jouant le rôle, dans certaines situations, de médiateur ».
Les semis d'automne commençant dans quelques jours, il y a désormais urgence à agir. À bon entendeur !