La FN3PT en pleine action dans un champ haut de gamme
Les trois organisations de producteurs de plants de pomme de terre certifiés s'étaient retrouvées sur un champ de vérification à Bou. Objectif : contrôler la qualité des lots et harmoniser les notations.
Le mercredi 2 juillet, la grande famille de la Fédération nationale des Producteurs de Plants de Pomme de Terre (Comité Centre et Sud, Comité Nord et Bretagne Plants) s'était donnée rendez-vous à Bou, où le CCS avait mis en place un champ national sur une surface proche de 1 ha (lire par ailleurs). Près de cent personnes venues de toute la France avaient effectué le déplacement : inspecteurs agréés du Service officiel de Contrôles (Soc), analystes agréés des laboratoires, personnels spécialisés dans l'expérimentation, personnels de stations de créations variétales, personnels oeuvrant dans la recherche et le développement, etc. Commentaire d'Éric Fallou, président de la FN3PT et du CCS : « L'objectif de la journée consiste à observer des lots qui seront à la base de la multiplication dans les années à venir. Les inspecteurs ont tous les lots à leur disposition et, par leur oeil professionnel, ils apportent des critiques : pureté variétale, absence de maladies, vigueur, etc. L'enjeu : par une visualisation, avoir la confirmation que ces matériels de sélection sont conformes à ce qu'ils doivent être en termes variétaux et sanitaires. »
Une telle réunion des trois organisations de producteurs composant la FN3PT a lieu tous les deux ou trois ans, à chaque fois dans une région différente. Le rendez-vous loirétain avait pour objectif l'évaluation de parcelles et, dans ce but, des équipes avaient été constituées. Directeur de la FN3PT, Bernard Quere a expliqué le sens de la démarche : « Que les gens se connaissent et puissent avoir des évaluations en fonction de leur activité. » Parmi les personnes présentes, figuraient deux inspecteurs régionaux d'encadrement du Soc, responsables de l'espèce pomme de terre : Gilles Chevalier (Centre) et Jerry Fromont (Nord). Le directeur de la Fédération a précisé quelle était l'idée générale des deux parcelles observées, jugées et notées par toutes les personnes présentes : un champ de comportement de 80 lots x 100 tubercules de plants certifiés pour« valider la qualité des plants produits en France en 2013 ». Quant au champ de conformité variétale, pour chacune des trois cent cinquante variétés, il s'articulait autour d'un rang témoin de référence issu d'une collection nationale, qui était comparé aux matériels de sélection de première et deuxième génération qui ont été produits (B1 et B2). Objectif : vérifier que ceux-ci soient conformes à la variété témoin.
Quatre cent mille boutures à partir de deux cents variétés
Responsable de laboratoire au Comité Nord, Xavier Riquiez a fait part de son analyse : « Tous ces échantillons serviront à faire les dix-huit mille hectares de plants de pomme de terre français dans les années qui viennent : il est important que le départ soit bon. D'où l'intérêt de voir le standard de la variété par rapport à la production in vitro. Quand on se trouve dans un champ, on n'a que la parcelle en question. Là, on compare un lot aux autres lots d'une même variété. La démarche doit aussi être validée par l'obtenteur, qui est le propriétaire de la variété. Nous comparons nos observations à celles des obtenteurs : si nos productions sont conformes, la multiplication se poursuivra. » Sur le champ de cette année, trois cent cinquante lots de B1 et autant de B2 provenaient du Comité Nord. Par ailleurs, en 2014, l'entité a produit en laboratoire quatre cent mille boutures à partir de deux cents variétés : cela donnera douze mille hectares de plants dans les années qui viennent. Le technicien a justifié l'intérêt du travail en laboratoire :« Vérifier l'état sanitaire des générations qui suivront : virus, champignons, bactéries, nématode, etc. Ces analyses et ces contrôles s'opèrent par délégation du Soc. Un inspecteur procède à des contrôles visuels du champ tout au long de la culture. Puis les analyses en laboratoire permettent de diagnostiquer la présence éventuelle de maladies et, enfin, les inspecteurs contrôlent les lots en vue de la certification, synonyme de commercialisation.»
Responsable du laboratoire du Comité Centre et Sud de Laurière (Haute-Vienne), Fanny Meytraud a indiqué l'intérêt que revêtait une telle journée : « Mettre en commun les observations de chaque région sur du matériel provenant de différentes régions. » Précisons que les groupes de notations qui avaient été constitués étaient composés de personnes originaires de différentes régions. Commentaire d'Emmanuel Guillery, directeur de Bretagne Plants : « Une telle journée offre l'occasion d'harmoniser la façon de juger les lots et les parcelles dans le cadre du Soc. Chaque année, de nouvelles variétés sont inscrites puis sont multipliées par nos producteurs : ce dispositif permet de mieux les connaitre. » Bretagne Plants assure 30 % de la production française de plants : 5.360 ha pour une production annuelle de 150.000 tonnes. Une grosse majorité de ce volume, 65 %, est exportée dans une cinquantaine de pays.
L'évolution permanente du cortège parasitaire
Ingénieur de la FN3PT détachée à l'Institut national de la Recherche agronomique (Inra) de Rennes-Le-Rheu (Ille-et-Vilaine), Anne-Claire Le Roux est spécialisée dans les bactéries et les nématodes.« La recherche a pour mission d'apporter des solutions afin de lutter efficacement contre les maladies et les pathogènes. Nous menons également des études sur le développement des maladies : c'est ce qu'on appelle l'épidémiologie. Nous travaillons aussi à l'identification et à la caractérisation des pathogènes afin de voir leur évolution. » Plusieurs facteurs conduisent à une évolution du cortège parasitaire de la pomme de terre : l'environnement, les échanges commerciaux, qui font arriver de nouvelles souches ou encore l'émergence de nouveaux ravageurs ou maladies. « Combattre les virus suppose de lutter contre les vecteurs, les pucerons en particulier. Pour les bactéries, il n'existe aucun moyen de lutte directe. Les solutions dont nous disposons résident dans la prévention et la prophylaxie. Cela passe par l'utilisation de tubercules sains : nous les testons avec des méthodes de détection sensibles et spécifiques. Quel que soit le pathogène, il faut essayer de le détecter le plus tôt possible afin d'écarter les lots et les parcelles à risque. »
Ingénieur de la FN3PT détachée au centre Inra de Ploudaniel (Finistère), Sylvie Marhadour travaille sur le volet création variétale : « On commence par faire un croisement. Celui-ci s'opère sous serre au printemps. Ce n'est pas le mode de reproduction que certains préfèrent : il faut savoir s'y prendre. » Question cruciale : le choix des parents. Une décision du sélectionneur en fonction du type de variété qu'il veut faire. « Une fois que le croisement a pris, on obtient des graines : on les sème sous serre l'année suivante. Puis les premiers tubercules apparaissent. » Entre le travail au champ et en laboratoire, la sélection variétale est un processus de dix ans. Une trentaine de caractères est prise en compte : les aspects agronomiques (rendements, précocité, teneur en matière sèche) et technologiques, la résistance aux maladies, etc. Au bout de dix ans, le sélectionneur propose la variété à l'inscription au catalogue national. Ce qui nécessite deux années supplémentaires d'examens approfondis : si elle est inscrite, la variété peut être cultivée. « On part de plusieurs milliers de graines représentant chacune une variété potentielle et on arrive à deux ou trois hybrides prêts pour la sélection. Cela se passe en réseau entre sélectionneurs, y compris à l'étranger. L'enjeu : avoir une bonne évaluation de ce que donne une variété dans un environnement différent. »