Vin
Valérie Forgues sort des sentiers battus
Viticultrice biologique à Mareuil-sur-Cher (Loir-et-Cher), Valérie Forgues se confie sur son rapport à la terre, à la vigne et au vin.
Viticultrice biologique à Mareuil-sur-Cher (Loir-et-Cher), Valérie Forgues se confie sur son rapport à la terre, à la vigne et au vin.


Ingénieur de formation et possédant une expérience dans l’industrie agroalimentaire, Valérie Forgues a repris le domaine de la Méchinière, à Mareuil-sur-Cher, en 1997. « Je l’ai entièrement transformé », déclare la viticultrice. Celle-ci a adhéré à Terra Vitis en 2000 avant d’entamer une conversion biologique treize ans plus tard. Depuis 2019, ses 14 ha de vignes sont certifiés.
La professionnelle explique : « J’ai remplacé le désherbage chimique par un travail du sol. J’utilise plusieurs outils : soc pour butter et débutter la vigne, décavaillonneur hydraulique et lames interceps. J’essaie de travailler sous le rang. D’où un besoin en matériels. Cela représente un coût et nécessite un savoir-faire. Pendant longtemps, la terre a été tassée. La reprise du sol se fait sur plusieurs années ».
États-Unis : 75 % des débouchés
Valérie Forgues poursuit : « En conventionnel, les produits rentrent dans la plante. Lorsque j’ai entamé ma conversion, le système immunitaire de la vigne était affaibli. Or 2016 fut une année humide, favorisant le mildiou et l’oïdium. La vigne avait besoin de se recréer un équilibre. J’ai traité avec un produit à base de cuivre et de soufre. Mais cela n’a pas fonctionné, générant de mauvais rendements. Progressivement, la vigne s’est consolidée et j’ai mieux maîtrisé le travail du sol ».
« J’ai créé une relation personnelle avec la vigne. On ne se convertit pas à l’agriculture biologique sans remise en cause dans sa vie privée. C’est une philosophie », dit encore la vigneronne. Les États-Unis représentent les trois quarts de ses débouchés. Mais, en 2020, à cause de la taxe Trump, la Mareuillaise n’a vendu que 10 % de ses volumes habituels outre-Atlantique. Et la crise sanitaire est une seconde source d’inquiétude…
« Une relation humaine avec les clients »
Valérie Forgues vendange manuellement. « Cela permet de ramener un raisin sain et intègre pour raconter son fruit. Mes vins sont le reflet de leur paysage », indique l’intéressée. D’ajouter : « Mes raisins possèdent une riche microflore. Je pars de ces éléments endogènes. Une vinification débute par de l’huile de coude car il faut nettoyer les cuves. Un bon démarrage de fermentation nécessite une surveillance des températures et des analyses pour éviter toute dérive ».
« Je veux que les vins blancs soient synonymes de plaisir et non d’acidité », insiste la vigneronne. Lors de la fermentation, les levures consomment le sucre et le transforment en alcool. Une fois leur œuvre achevée, celles-ci meurent, laissant la place à d’autres micro-organismes. Pour arrêter la fermentation, on aseptise le milieu avec du soufre.
Reste la question de l’acidité. Valérie Forgues explique : « Si on produit un vin technologique, on achète des levures, des activateurs de fermentation et des désacidifiants ». Notre interlocutrice a effectué un autre choix : « Après la fermentation alcoolique, je laisse les bactéries se développer. Celles-ci consomment l’acide malique et libèrent l’acide lactique. La fermentation malolactique réduit l’acidité du vin. Mais ce procédé peut durer des mois. Cela apprend la patience et l’humilité ».
Valérie Forgues conclut : « Nous devons faire attention à la planète. En évoluant dans le bio, j’ai élaboré des vins qui sortent des sentiers battus. Les clients y sont sensibles. J’ai une relation humaine avec eux ».