Un franc succès pour les techniques alternatives
Le 3e Rendez-vous Tech&Bio de la région Centre Val de Loire s’est tenu au Lycée agricole de La Saussaye situé à Sours près de Chartres, jeudi 12 avril.
Après les succès des évènements précédents consacrés à la viticulture en 2014, à l’élevage en 2016, les grandes cultures, étaient à l’honneur jeudi12 avril. C’est le Lycée agricole de la Saussaye qui a accueillit l’événement. L’exploitation agricole de l’EPL de Chartres s’étend sur une surface de 136 ha cultivés en grandes cultures non irriguées. 40 ha sont consacrés à l’agriculture biologique et comprennent notamment un essai conduit depuis 2011 qui compare un système extensif et un système productif. « Avec notre expérience, nous pouvons accompagner les jeunes sur de nouvelles réflexions comme les modifications des pratiques en mettant en avant l’importance de l’agronomie » assure Frédérique Elbé, directeur du EPL de Chartres « La Saussaye ». «Le lycée agricole de la Saussaye fait partie des lieux départementaux voire régionaux qui réalisent des recherches expérimentales vers le « moins de phytos/intrants». En région Centre Val de Loire, la filière grandes cultures représente une économie importante» débute Jean-Pierre Leveillard, président de la chambre d’agriculture régionale. Le Tech&Bio sert à ancrer la filière dans l’agro-écologie et de répondre aux attentes des agriculteurs qu’ils soient bios ou conventionnels. « Il est important de partager les techniques de l’un et de l’autre et d’échanger » assure-t-il.
Conférences, ateliers et démonstrations
La troisième édition de cette manifestation, à caractère régional et national, s’est déroulée en Eure-et-Loir sur le thème des grandes cultures. Elle a réuni près de 70 exposants et a attiré plus de 1.000 visiteurs. Les exposants ont été organisés en 4 pôles, fertilité des sols ; gestion des adventices ; rotation et filières et environnement et protection des cultures.
« Grande première cette année, en plus des conférences thématiques et des nombreux ateliers, nous avons créé un club affaires. C’est une solution pour faciliter la mise en relation entre agriculteurs et entreprises. C’est un rendez vous de 10 minutes où les entreprises présentent leur offre puis échangent avec les agriculteurs » détaille Eric Maisons, président du Rendez-vous Tech & Bio 2018 de la région Centre Val de Loire.
Les agriculteurs qui ont fait le déplacement, en grandes cultures ou polyculture élevage, en système biologique ou conventionnel ont pu découvrir de nouvelles techniques, en savoir plus sur la conversion. Avec les nouvelles réglementations et la réduction des produits phytosanitaires, les céréaliers s’interrogent. Sans passer par la conversion, un agriculteur en conventionnel peut s’appuyer des techniques alternatives pour réduire ses passages.
Zoom sur le pole Gestion des adventices
Par exemple, la réussite du désherbage mécanique passe par une bonne connaissance du matériel : conditions d’utilisation optimales, réglages, complémentarités… Lors d’une démonstration sur le pole Gestion des adventices, Michael Graciano de la Chambre d’agriculture du 41 expliquait : « En agriculture biologique, le seul moyen de détruire les adventices, ce sont les outils mécaniques. Un agriculteur n’investit pas dans une machine juste pour le plaisir. Il faut d’abord qu’il repense son système afin de gérer et comprendre le vivant, une fois que l’on est dépassé, on passe par des outils mécaniques »
En Grandes cultures bio, la gestion des adventices passe avant tout par une lutte préventive. La rotation est le pilier de cette gestion, notamment grâce à l’introduction de cultures dites « nettoyantes » et à la diversité des cultures. Il faut aussi rester très attentif. Par exemple, dès que le chiendent apparaît, il faut agir immédiatement et ne pas se laisser envahir. « Le meilleur outil c’est la binette à main. Des solutions mécaniques existent. Pour du chiendent, il ne faut pas passer qu’une seule fois, mais une fois tous les 15 jours pour épuiser l’adventice » assure-t-il. L’autoguidage en bio est essentiel. « La bineuse ne fait pas des miracles et pour éviter les dégâts, les machines sont équipées en guidage optique. Depuis 4 - 5 ans, il y existe des caméras sophistiquées, en haute définition et en couleur » indique le conseiller. Ces caméras vont s’appuyer sur trois ou quatre paramètres et vont permettre à l’agriculteur de travailler avec beaucoup plus de précisions. Grâce à un phare installé exprès pour la caméra, il est également possible de travailler la nuit. Le binage est la clé. C’est pourquoi il faut être bien équipé et le guidage est un vrai plus qu’il soit optique ou RTK.
Cap filière et fonds de garantie
Le 15 mars 2017, le cap filière Grandes Cultures a été renouvelé. Le Cap Filière Grandes cultures 2017-2020 est basé sur 4 axes : anticiper les changements climatiques pour les atténuer, maîtriser le désherbage, relancer le blé dur, accompagner les agriculteurs en agriculture biologique. Sur 4 ans, cela représente un soutien du conseil régional de 600 000 €. La région Centre Val de Loire, une région axée sur la production de grandes cultures est en recherche permanente de références : 3e région européenne productrice de céréales, 2e région française productrice d’oléagineux, 3e région européenne productrice de protéagineux.
Harold Huwart, vice-président du conseil régional du Centre Val de Loire a rappelé le soutien de la Région à la filière Grandes cultures « Nous nous sommes engagés au travers d’un CAP filière pour mettre en place le fonds de garantie régional SIAGI. Un fond mutualisé pour faciliter le financement des projets d’investissements des agriculteurs. La Région partage l’ambition de la filière à développer des pratiques alternatives et en premier lieu développer la culture biologique. »
Selon la SIAGI, le fonds de garantie permettra de lever, potentiellement, 30 millions de crédit potentiellement. Grâce à ce fonds, l’accès au crédit sera facilité et la patrimoine de l’exploitation agricole sera protégé.
«La filière grandes cultures, filière emblématique de notre territoire, doit faire face à de nouveaux défis : ancrer l’agro-écologie au cœur de son développement, renforcer la durabilité des entreprises, répondre aux attentes de ses consommateurs proches et lointains. Ces enjeux sont au cœur du projet de filière régionale élaboré en 2016 » poursuit-il.
« Il a un potentiel de développement très fort, sur le pain, les pates ou la bière bios. L’objectif de doublement des surfaces en bio en 5 ans et la valorisation de l’origine France est un objectif clairement fixé. Aujourd’hui, la France importe des céréales bios avec des certifications éventuellement moins solides que ce que l’on pourrait trouver sur le territoire » insiste Jean-Roch Gaillet, Directeur de la DRAAF.
On note une progression de 5 % des surfaces en grande cultures bio en Centre Val de Loire entre 2015 et 2016 contre 20 % au national. Il existe donc une grande marge de développement. Le ministre de l’agriculture, Stéphane Travers a annoncé le renforcement du programme « ambition bio » avec une enveloppe de 1,1 milliards d’euros sur 2018-2022. Une annonce qui laisse Eric Thirouin dubitatif. « J’espère qu’il ne sera pas question de prendre l’argent de Pierre pour rendre à Paul… J’espère que ça viendra vraiment de Bercy et de l’Etat et que ce ne sera pas une charge supplémentaire pour les agriculteurs conventionnels» indique le président de la chambre d’agriculture du 28.
Le salon Tech&Bio ce n’est pas uniquement pour se convertir au bio, c’est surtout une belle opportunité pour découvrir des techniques alternatives… Pour compléter cette journée, un deuxième rendez-vous Tech&Bio est prévu le 20 juin en île-de-France.