Conférence
« Un conflit qui est militaire mais également agricole »
Vendredi 13 mai, lors de l’assemblée générale de l’Amoma 41, Jean-Jacques Hervé, président de l’Académie d'agriculture, a tenu une conférence sur les conséquences de la guerre en Ukraine pour l’agriculture en Europe.
Vendredi 13 mai, lors de l’assemblée générale de l’Amoma 41, Jean-Jacques Hervé, président de l’Académie d'agriculture, a tenu une conférence sur les conséquences de la guerre en Ukraine pour l’agriculture en Europe.
Après l’assemblée générale de l’Amoma 41, vendredi 13 mai à la Maison de l’agriculture, Jean-Jacques Hervé, président de l’Académie d’agriculture et spécialiste de l’Ukraine et de la Russie, est revenu sur le conflit qui oppose la Russie à l’Ukraine. « Ne nous trompons pas, la Russie n’attaque pas l’Ukraine, c’est nous qu’elle attaque, c’est l’Europe », a expliqué Jean-Jacques Hervé en préambule de son intervention.
Deux colosses agricoles
Jean-Jacques Hervé présente ces deux pays comme « deux colosses agricoles » avec quelque 40 millions de terres cultivables en Ukraine et 220 millions d’hectares en Russie. Il faut aussi savoir que la Russie possède « un stock de terres non cultivées de 200 millions d’hectares et peut-être plus si on intègre le changement climatique », explique Jean-Jacques Hervé. L’Ukraine est le premier exportateur mondial d’huile de tournesol. Toutefois, avec la guerre aujourd’hui, « il y a 50 à 60 % de la production qui est bloquée », selon le président de l’Académie d’agriculture. D’ailleurs, « le jaune du drapeau ukrainien fait référence à la couleur du tournesol et le bleu au ciel », détaille Jean-Jacques Hervé. La Russie n’est pas au maximum de ses capacités car le pays « produit aujourd’hui 100 millions de tonnes, ce qui fait 0,5 tonne par hectare », ce qui laisse une forte marge de progression. Les coûts de production en Ukraine, si on prend comme indicateur le blé, sont « d'une centaine de dollars la tonne, ils dépensent entre 500 et 600 dollars par hectare pour produire 6 tonnes ». Ce qui est deux fois moins cher que dans la plupart des pays européens, selon lui. Les exploitations agricoles font en moyenne « entre 400 à 500 hectares ».
Des solutions à trouver
Aujourd’hui, les productions russes et ukrainiennes en huile de tournesol et en blé sont bloquées par la fermeture de la mer Noire, ce qui fait exploser les prix. Toutefois, selon l'expert, « il va falloir réfléchir à des solutions efficaces pour alimenter nos amis d’Afrique à des prix acceptables ». Il se pourrait, en effet, que la Russie propose à ces pays des prix beaucoup moins élevés. Ce qui pourrait remodeler les échanges commerciaux et internationaux agricoles existants. Sans oublier que le changement climatique actuel pourrait d'ici à 2050 induire une augmentation considérable de production en Russie, dans la région de Sibérie. « On pourrait passer de 120 millions de tonnes de grains à 240 millions, c’est une donnée que l’on est obligé d’intégrer dans notre réflexion », pointe le spécialiste.
À la suite de sa conférence, Jean-Jacques Hervé a répondu aux questions de l'auditoire, nourrissant de riches échanges.