Récolte : double peine pour le secteur du Perche
Si l’hétérogénéité domine les résultats de la dernière récolte, le Perche paye un lourd tribut du fait de la sécheresse. Le point avec l’éleveur Yohann Serreau.
« Nous avons obtenu l’autorisation de pâturer les jachères le 31 juillet, mais c’est trop tard, tout est grillé. Nous l’avions demandée en avril et la préfète l’a refusée en juin », déplore Yohann Serreau, éleveur laitier à La Gaudaine dans le Perche. Car outre une récolte qu’il juge pire que celle de 2016 — « c’est catastrophique, même ceux qui d’habitude font de bons rendements se prennent une claque » — celle-ci se double d’une sécheresse qui dure depuis la mi-mars, la double peine en quelque sorte pour ce secteur d’élevage.
Dans le Perche, la première coupe d’herbe s’est faite très tôt mais avec des résultats décevants (moins 20 à 30 %) : « et comme au 15 mai tout était fait nous pensions pouvoir faire une autre coupe mais depuis, rien ».
Les récoltes fourragères en dérobé sont réduites de 20 à 30 %, pour les prairies pâturées même sentence, pour le ray-gras idem, la luzerne, qui a peiné de l’excès d’eau au début, est à moins 20 %. « Reste la question du maïs, à mon avis ce sera moins 30 % et certaines parcelles ne donneront rien… En tous cas, avec cette hétérogénéité, le suivi de la matière sèche par la Chambre sera crucial cette année pour ne pas se louper à la récolte. Et puis il y a le problème de la betterave, il y a un gros risque d’avoir un manque de pulpe ».
D’après une étude, les pertes dans le Perche devraient s’échelonner de 10 000 à 30 000 euros selon le secteur : « Même si nous refaisons une coupe, ça ne rattrapera pas », pointe l’éleveur, qui relève : « Sans eau, la contrainte est importante. Le stockage de l’eau sera une question centrale à l’avenir. Quelques retenues permettraient d’assurer du fourrage ou des cultures de diversification. Ce serait une solution face aux aléas climatiques. Il faudrait que la population accepte quelques évolutions ».
Quant au secteur allaitant : « c’est la troisième année avec une baisse des fourrages et des prix de viande qui stagnent. J’ai de grosses craintes. Certains ont commencé à affourager début juillet… La solution pour eux sera d’avoir moins de vaches ou d’acheter du fourrage, mais à quel prix ? Pour le secteur laitier, c’est moins catastrophique qu’en 2016 car le prix du lait n’était pas là. Certes, avec la Covid, il a un peu baissé (- 4 %), mais il se tient. Heureusement ».
Et puis, pour l’élevage, il y a un élément clé qui risque de manquer aussi : « La paille. C’est moins 50 %, souligne Yohann Serreau. Beaucoup se sont fait surprendre et seront limités. Ceux qui en achètent un peu devront en acheter beaucoup plus. Et il va falloir se couvrir rapidement car ça va tirer à l’Ouest et au Benelux. Là aussi les prix risquent de monter, ajoutant de la crise à la crise ».
Hervé Colin