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Alimentation
La Cour des comptes dénonce l'insuffisance des contrôles des spécialisés et des abattoirs

Contrôles insuffisants et de mauvaise qualité, autocontrôles des entreprises défaillants, la Cour des comptes ne ménage pas la chaîne agro-alimentaire dans son rapport 2014 déplorant également l'absence de sanctions.

© JC Gutner

Un an pile après l'affaire du « horsegate », la découverte de viande de cheval dans les lasagnes au boeuf, la Cour des comptes dénonce des anomalies graves dans le contrôle des aliments tout au long de la chaîne alimentaire et l'insuffisance de contrôles et de sanctions. « Au total, l'absence de contrôle à un niveau significatif et l'absence de sanctions suffisantes mettent en lumière des anomalies graves », pointe la Cour des comptes dans son rapport 2014. Premiers visés : les agriculteurs, et notamment ceux qui ne bénéficient pas des aides de la Pac. « Les contrôles s'exercent prioritairement sur les exploitations agricoles qui bénéficient des aides de la Pac (...) Les exploitants qui ne bénéficient pas d'aides de la Pac, notamment les arboriculteurs, les maraîchers (et les viticulteurs avant 2008) ne sont quasiment pas contrôlés... », note la Cour des comptes.


La Cour déplore également l'absence de plan de surveillance ou de contrôle sur les contaminants à risque comme le cadmium en particulier au niveau des intrants, engrais et boues d'épuration, malgré les mises en garde de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation et de l'environnement (Anses). Idem sur les zones à risques où s'applique la réglementation des installations classées pour la protection de l'environnement.


Filières végétales


D'une façon générale d'ailleurs, la Cour des comptes pointe la diminution du nombre de contrôles sanitaires dans les quelque 506 000 établissements relevant de la compétence de la Direction générale de l'alimentation du ministère de l'Agriculture (DGAL) (abattoirs, restauration commerciale et collective, grandes et moyennes surfaces et autres métiers de bouche...). Ainsi, par exemple, le nombre de contrôles a baissé de 17 % entre 2009 et 2012 dans établissements agréés, notamment les abattoirs. Et quand les contrôles sont effectués, la Cour met en évidence des taux importants de non-conformité, notamment sur les produits provenant de l'Union européenne : 17 % pour les viandes fraîches de boucherie, 13 % pour les viandes fraîches de volaille, 25 % pour les produits à base de viande, 21 % pour le lait et les produits à base de lait. Sans que les sanctions suivent. Il existe « de graves non-conformités dans les abattoirs qui pourraient justifier la suspension de leur agrément », estime-t-elle. A ce titre, 16 abattoirs d'ongulés domestiques sur 270 seraient non conformes et 31 abattoirs de volailles et lapins sur 699. Ceci étant, la Cour déplore également l'insuffisante répercussion sur les professionnels du coût des contrôles. En soulignant par exemple que les dépenses d'inspection dans les abattoirs s'élevaient à 71,2 MEUR en 2012 contre 48 MEUR de produit des redevances sanitaires et de découpage. Et pour ce qui est des végétaux, la Cour met également en évidence des taux de non-conformité élevés liés à « l'utilisation de produits phytosanitaires dont l'autorisation de mise en marché est retirée », ainsi que la présence élevée de produits phytopharmaceutiques dans les denrées alimentaires. Alors que les études récentes de l'Institut de veille sanitaire (INVS) ou de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) « établissent un lien entre l'exposition aux produits phytosanitaires et certaines pathologies et s'inquiètent des effets cocktail et faibles doses ». Quant aux professionnels qui doivent réaliser des autocontrôles, ceux-ci « sont de qualité variable et les non-conformités ne sont pas portées à la connaissance des professionnels ». Bref un diagnostic assez sévère de la politique de sécurité alimentaire....Un héritage du passé Directement mis en cause, le ministère de l'Agriculture renvoie le sévère diagnostic de la Cour des comptes à un héritage du passé et à la réduction « drastique » des effectifs décidée dans la cadre de la politique de réforme de l'Etat du précédent gouvernement. 620 postes ont été supprimés « fragilisant le modèle sanitaire français ». Depuis, les effectifs ont été sanctuarisés à 4500 agents vétérinaires et techniciens « affectés au contrôle de sécurité de notre alimentation », assure le ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire. Ceci étant plaide-t-il, « ce rapport ne saurait occulter l'excellence du système de sécurité sanitaire français, parmi les plus exigeants et les plus performantsdu monde, comme l'attestent les rapports de la Commission européenne et de l'Organisation mondiale de la santé animale ».


Les Safer épinglées


Créées au début des années 60, les Safer ont pour mission de favoriser l'installation des jeunes et l'agrandissement des exploitations familiales dans de bonnes conditions, rappelle la Cour des comptes. Mais c'est pour préciser aussitôt que ce rôle a été dévoyé. Les Safer « sont devenues des opérateurs fonciers en milieu rural y compris pour les activités non agricoles », explique la Cour. Ce qu'elle leur reproche, c'est de se livrer à trop d'opérations « de substitution » qui permettent un changement de propriété sans procéder à l'achat puis à la rétrocession. Les Safer servent aujourd'hui le plus souvent « de pur intermédiaire dans des transactions sur les biens fonciers dont la vocation est parfois résidentielle, en faisant bénéficier les parties privées de leur privilège fiscal », déplore la Cour des comptes qui préconise de « réserver l'exemption des droits d'enregistrement aux opérations qui relèvent de l'intérêt général ». Autrement dit, les Safer se livrent à des opérations d'optimisation fiscale au détriment de l'Etat, des départements et des communes. L'avantage fiscal concernant les seules opérations de « substitution » est de plus de 46 MEUR en 2012 ce qui a contribué à conforter les ressources des Safer.

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