Jachères mellifères : un mélange qui tient la route
L’association Hommes et territoires et ses partenaires ont organisé, le 11 juillet à Cormainville (Eure-et-Loir), une journée technique consacrée aux jachères mellifères.
En 2012, un début de conflit avait surgi dans la plaine en raison de la concurrence de certaines jachères mellifères avec la production de semences potagères et plus particulièrement celles de carottes. Un mal pour un bien, car en 2015 les acteurs concernés se sont constitués en un groupe de travail qui s’est mis autour d’une table pour trouver une solution. Et celle-ci a pris la forme d’un mélange d’espèces de dix plantes mellifères*, dérivé d’un mélange commercialisé, favorable à la faune sauvage et qui ne nuit pas à la multiplication.
Pour s’en assurer, des tests ont étés menés à partir de 2017 sur plusieurs sites de la région et les résultats de cette expérimentation ont été présentés lors d’une journée technique organisée par l’association Hommes et territoires, la Fnams (Fédération nationale des agriculteurs multiplicateurs de semences) et la Fédération régionale des chasseurs, dans le cadre du Cap filière semences, le 11 juillet sur l’un de ses sites, une jachère de Cormainville.
L’étude a porté sur différents suivis au cours des trois dernières années.
Au niveau botanique, des relevés de la végétation présente ont été effectués, la fréquentation par les pollinisateurs étudiée et les traces laissées par la faune sauvage ont été observées. Par ailleurs, un suivi de la pollinisation de la carotte porte-graine a été mené en analysant le pollen apporté dans les ruches.
Le premier constat qui s’impose est que les espèces semées s’expriment bien et se maintiennent en faisant régresser la présence d’adventices et de sol nu. De nombreux pollinisateurs y ont été observés, des abeilles sauvages et domestiques, mais aussi des bourdons, des syrphes et des diptères. La floraison apparaît début juin avec un pic en juillet et août et se maintient jusqu’à l’automne.
Concernant le travail des abeilles, il apparaît qu’elles ont fait leur travail pour les porte-graines, les jachères ne les en a pas détournées.
Pour la Fédération départementale des chasseurs, la jachère joue bien son rôle d’abri et de source de nourriture (insectes, végétaux et graines) pour la faune sauvage. « Nous sommes prudents sur les résultats, néanmoins, sur l’ensemble de la période, évalué sur quinze, le couvert est largement au-dessus de la moyenne. Le sarrasin et les légumineuses sont appétents pour le lièvre et le chevreuil, nous avons insisté pour conserver une part non négligeable de ces espèces dans le mélange », a précisé Aude Bouron, de la Fédération régionale des chasseurs.
De son côté, l’exploitant des parcelles alentours, Sylvain Marcuard, a témoigné de la facilité d’implantation de la jachère : passage d’un déchaumeur à disque, semis de 20 kg par hectare avec un combiné plus rotative et tout a bien levé.
Il a précisé : « Mon grand-père a quelques ruches pour polliniser les porte-graines et elles sont en forme. La carotte a bien été pollinisée. La présence de la jachère encourage les abeilles et amène de la sécurité ».
Quant au coût du mélange — autour de 150 euros par hectare —, il est à relativiser en regard de sa qualité et de la durée durant laquelle la jachère va rester en place. Ce sera d’ailleurs l’objet, avec sa conduite, de la suite de l’expérimentation menée par le groupe de travail.
Hervé Colin
*Le mélange pour est constitué de : souci (2 %) ; sainfoin (20 %) ; sarrasin (30 %) ; trèfle incarnat (20 %) ; bourrache (20 %) ; mauve sylvestri (1 %) ; grande marguerite (1 %) ; luzerne (10 %) et achillée millefeuille (1 %).