Surprenante Maison Picassiette
La Maison Picassiette à Chartres (Eure-et-Loir) fait partie de ces curiosités qui valent le coup d'œil. Cette maison et ses extérieurs à l'architecture parfois étrange sont totalement recouverts de mosaïques.
La Maison Picassiette à Chartres (Eure-et-Loir) fait partie de ces curiosités qui valent le coup d'œil. Cette maison et ses extérieurs à l'architecture parfois étrange sont totalement recouverts de mosaïques.
Quand on arpente la rue du Repos en périphérie de Chartres (Eure-et-Loir), on ne peut pas se douter que s'y cache une curieuse maison. Totalement recouverte de mosaïques réalisées avec des débris de vaisselle en porcelaine et de verre en tout genre, on l'appelle la Maison Picassiette. Du sol au plafond, dans chaque recoin, sur tous les objets et même au jardin, cette œuvre monumentale entre art brut et art naïf interpelle. Fresques et sculptures se mêlent aux mosaïques.
Raymond Isidore, artiste atypique
Cette curiosité artistique est l'œuvre d'un seul homme, de condition très modeste, qui est devenu « par hasard » mosaïste, peintre et bâtisseur. Raymond Isidore est né en 1900 à Chartres, dans une famille peu aimante. Peu instruit, il enchaîne plusieurs métiers tels que fondeur, chauffeur de tramway à vapeur, cantonnier, balayeur de cimetière… En 1929, il achète un petit terrain sur lequel il construit, en autodidacte, une petite maison avec trois pièces en enfilade, pour y loger sa femme Adrienne, une veuve qu'il a épousé quelques années auparavant, et les trois enfants de celle-ci. Sans but précis, lorsqu'il se promène, il ramasse les petits morceaux de vaisselle cassée, les débris de verre qui jonchent son parcours. Il les amoncelle dans son jardin, les trie par couleurs. Un jour des années 30 lui vient l'envie d'en faire une mosaïque pour décorer sa maison. Sa passion dévorante est lancée, tout l'intérieur, y compris les meubles et objets, puis l'extérieur de la demeure se recouvrent petit à petit. Il parcourt des kilomètres pour trouver ses matériaux, se fournit dans les décharges… Il devient le « pique-assiette », puis Picassiette, certainement en clin d'œil à Picasso.
Après la Seconde Guerre mondiale et un séjour en hôpital psychiatrique à la suite d’une crise de démence, il entreprend de nouvelles constructions derrière sa maison. Ainsi, une chapelle, une maison d'été, un trône, un porche et le « tombeau de l'esprit » sont notamment érigés. Dans le jardin qu'il a entouré de murs, il crée des statues, dresse une petite Tour Eiffel en béton, bien sûr le tout recouvert de mosaïque. Marquant sa foi, de nombreuses représentations de la cathédrale de Chartres jalonnent son œuvre.
Même s'il est parfois pris pour un fou, l'originalité du personnage et de son art plaisent. Il ouvre sa maison aux visiteurs dès les années 50, et la presse parle de lui. Il reçoit même la visite du peintre Picasso et du photographe Robert Doisneau, qui l'a immortalisé. En 1964, après quelque trente années passées inlassablement à décorer sa petite propriété, Raymond Isidore meurt la veille de ses 64 ans.
Rachetée par la Ville de Chartres en 1981, classée Monument historique en 1983, la Maison Picassiette a reçu le label architectural Patrimoine du XXe siècle du ministère de la Culture en 2017.