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Pommes de terre : « le client doit savoir que la sécurité a un coût »

À la suite de l’interdiction d’un inhibiteur de germination, le chlorprophame (CIPC), les techniques de stockage des pommes de terre évoluent mais avec un surcoût. Nicolas Brunet témoigne.

Depuis août 2020, l’application d’un antigerminatif, le Xdermate, n’est plus possible, la matière active le composant, le CIPC (chlorprophame) étant interdite. Ce produit était pulvérisé dans les cellules stockant des pommes de terre un mois après la récolte, quand leur température est descendue de 25  °C à 4  °C pour une variété Agata — 7  °C pour une variété destinée aux frites.

Un ou deux autres passages, à intervalles de six à huit semaines, après observation, étaient nécessaires pour maintenir une pomme de terre sans germe jusqu’en avril-mai.

L’interdiction de cet inhibiteur de germination a eu une incidence au niveau de la technique de stockage, mais également sur le coût de celui-ci. Témoignage de Nicolas Brunet, producteur de pommes de terre à Noyen-sur-Seine, qui réalise également de la prestation de service pour le stockage des pommes de terre d’autres producteurs qui travaillent pour l’entreprise Parmentine.

Depuis deux campagnes, Nicolas Brunet et un collègue, Philippe Renaudat, ont anticipé cette réglementation.

Ils ont aménagé leur bâtiment de stockage situé à Villenauxe-la-Petite afin de travailler autrement et répondre également à la demande sociétale avec un produit final sans aucun résidu de produits chimiques.

Alors que la pomme de terre sécrète naturellement de l’éthylène, ils augmentent la teneur de ce produit naturel dans les cellules de stockage afin de stopper la végétation. « Des capteurs installés au sein du frigo déterminent la teneur en éthylène et en diffusent si nécessaire.

Cette technique, outre l’investissement en matériel spécifique, nécessite un bâtiment hyper étanche, explique Nicolas Brunet qui, pour équiper le bâtiment, d’une capacité de stockage de 5  000 tonnes, a dû investir 45  000 euros avec son collègue.

Dès l’ouverture des frigos, une semaine avant la vente, un thermonébulisateur diffuse du Biox-M, antigerme naturel composé d’huile essentielle de menthe, qui permet à la pomme de terre de se conserver pendant six semaines sans germer. Cette étape représente un coût supplémentaire de 4 euros/tonne ».

« Cette technique est un véritable casse-tête pour organiser les lots, les gazer et gérer les refus et retours. Et nous avons la chance de disposer de six cellules de 800 tonnes, ce qui facilite le travail. C’est un gros défi logistique pour le vendeur et l’acheteur qui a un coût. Le traitement antigerminatif est estimé entre 7 et 9 euros, contre 3 euros/tonne auparavant, auxquels s’ajoute l’investissement ».

De plus, lors de l’arrêt du CIPC, ils ont dû nettoyer l’ensemble du bâtiment. L’installation du thermonébulisateur réduit également le stockage de 50 tonnes dans chaque cellule.

Si un produit antigerminatif en végétation est encore autorisé, il fonctionne de manière aléatoire, nécessite de réunir de nombreux critères et ne permet pas de commercialiser un produit avec zéro résidu.

« Le système de stockage que nous utilisons est plus technique, plus cher, nécessite plus de surveillance, mais nous devons aller vers des choses crédibles pour la société. Toutefois, nous devons le retrouver en termes de valorisation. Le client doit savoir que la sécurité a un coût. »

Laurence Goudet-Dupuis

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