Portrait
Philippine Allard, cheffe d'exploitation
Agricultrice à Charsonville (Loiret), Philippine Allard veut valoriser la place de la femme dans les exploitations céréalières.
Agricultrice à Charsonville (Loiret), Philippine Allard veut valoriser la place de la femme dans les exploitations céréalières.
Installée en début d’année sur son exploitation, Philippine Allard a dû s’opposer à de nombreux clichés sur la place de la femme dans l’agriculture. Après une première campagne éprouvante, elle tient à attirer l'attention sur ces stéréotypes persistants.
Depuis le départ en retraite de son père en janvier 2022, Philippine Allard a repris l’exploitation familiale 100 % irriguée où elle produit maïs, blé tendre, blé dur, pois, orge de printemps et blé améliorant. Elle a parallèlement remis en place un atelier de multiplication de semences. « Cet atelier de production est à destination des coopératives, précise-t-elle. J’ai réintroduit cette pratique que mon père avait arrêtée il y a quelques années. Cela m’a demandé de la rigueur dans les champs, mais aussi administrativement ». Aujourd’hui, cet atelier s’étend sur 45 hectares, soit un quart de l’exploitation.
Un changement de carrière
Bien qu’elle ait été présente sur la ferme pour aider son père les années précédant son installation, le changement d’activité a été brutal pour la jeune femme. « Auparavant, je travaillais au Crédit agricole, explique-t-elle. Je rencontrais beaucoup de monde. Du jour au lendemain, mon lien social a été modifié ». À 29 ans, la jeune femme se consacre aujourd'hui à la valorisation de son exploitation. « Je fais partie de plusieurs groupements comme les Jeunes agriculteurs du Loiret ou encore le GDA* de mon secteur, indique-t-elle. Ces rencontres me permettent d’affiner mes connaissances et compétences ».
L’apprentissage perpétuel est un élément essentiel pour la cheffe d’exploitation. « En à peine un an, je me suis énormément enrichie, se réjouit Philippine. En tant qu’agricultrice, je dois être multitâche. Contrairement à mon précédent travail, dorénavant je suis seule face à certaines difficultés, et je dois les régler seule. Il faut savoir tout faire ».
Creuser son sillon
Selon les statistiques d'Agreste, les femmes représentaient 30 % des actifs permanents agricoles en 2020, contre 8 % en 1970. Malgré cette forte augmentation, elles demeurent minoritaires dans le monde agricole. « Beaucoup d’entre elles sont reléguées aux tâches administratives, estime Philippine Allard. Dans le Loiret, notamment, je ne connais que très peu de femmes céréalières, comme moi. Il faut défendre cette place qui est malheureusement sous-estimée ».
Durant son parcours à l’installation, la jeune femme avoue avoir dû se justifier de nombreuses fois. « J’ai dû prouver mes compétences, mes choix et mes actions, relate-t-elle. Les regards ne sont pas les mêmes que pour un homme. Agriculteurs, techniciens, agents administratifs : tous ont été plus attentifs à mes prises de décisions ». Aujourd’hui, l'agricultrice a su se faire accepter et respecter. « Je ne regrette rien, conclut-elle. Chaque métier a sa part d'avantages et d’inconvénients. J’aime mon métier pour sa diversité ».
*Groupement de développement agricole.