Le succès de l’élevage bio d’Eloïse Le Grand
Lors de son installation en 2017, Eloïse Le Grand s’est lancée dans l’élevage bio sur l’exploitation familiale, la ferme des Sueurs. La réussite de son projet va bien au-delà de ses espérances.
Au Val-Saint-Germain (Essonne), la métamorphose de la ferme des Sueurs a débuté il y a près de trois ans lorsqu’Eloïse Le Grand a choisi de s’installer sur l’exploitation familiale et de se lancer dans l’élevage. La ferme céréalière conduite en agriculture conventionnelle a alors entamé sa conversion en bio, puis trois petits bâtiments sont apparus pour accueillir les premiers poussins. Peu à peu, poulets, pintades, canards, volailles de fête et même poules pondeuses ont pris leurs quartiers dans la ferme.
Toute la production est 100 % biologique.
« Mon père continue de s’occuper des cultures et moi je me consacre à l’élevage, explique la jeune femme. J’ai produit 1 500 volailles en 2017 et aujourd’hui, face à la demande, j’ai plus que triplé ma production puisque je fais 5 000 volailles par an sans compter les volailles festives ».
À l’automne dernier, l’éleveuse a aussi démarré un élevage de cochons « pour tester la demande », souffle-t-elle. L’essai a été concluant puisque tous les porcs ont été vendus en à peine un mois. « Du coup, nous réfléchissons à monter un nouveau bâtiment pour faire du porc toute l’année. L’idée serait d’en faire cinq par mois environ, explique Eloïse Le Grand qui élève tous ses animaux en plein air. Ils sont tous sortis tous les matins et rentrés tous les soirs. Les volailles profitent de la grande mare devant la ferme ».
La famille a fait le choix de doubler les surfaces de prairies recommandées dans le cahier des charges de l’agriculture biologique. Un choix qui se revèle judicieux en cette période de l’année où le climat est chaud et très sec car « même avec de grandes surfaces, l’herbe vient à manquer », souligne l’éleveuse.
Les animaux de la ferme des Sueurs sont entièrement nourris avec la production de l’exploitation (blé, orge, triticale, féverole, maïs, betterave, luzerne, sarrazin, tournesol et pois) et la famille va même expérimenter la production de soja pour ses poules pondeuses.
Au moment de son installation, Eloïse Le Grand a créé un atelier d’abattage à la ferme pour ses volailles afin de s’assurer du bien-être de ses pensionnaires du début à la fin. « Les petits arrivent à un jour de vie et restent ici jusqu’à la fin. C’est important pour moi de ne pas leur imposer de transport inutile et de maîtriser leur fin de vie. On a vu de mauvaises choses dans certains abattoirs et si la société a été choquée, nous, éleveurs, l’avons été aussi. Nous aimons nos animaux, ce n’est pas facile de les voir partir mais lorsque c’est fait dans le respect de l’animal, c’est plus facile à accepter ».
Pour la trentaine de porcs produits cette année, Eloïse Le Grand a fait appel au service de l’abattoir de Houdan (Yvelines) et à l’atelier de découpe de Rambouillet.
La jeune éleveuse a conduit elle-même ses bêtes à l’abattoir et en garde un souvenir ému. « Cela fait partie du métier d’éleveur mais ce n’est pas l’étape la plus facile, surtout quand on noue une vraie relation avec ses animaux comme moi. En conduisant le camion, je n’en menais pas large, confie la jeune femme. À l’arrivée, j’ai tenu à décharger mes animaux moi-même, c’est la moindre des choses qu’on puisse faire… en attendant qu’un jour, nous obtenions la possibilité d’avoir des camions d’abattage mobile à la ferme. »
La totalité de la production d’Eloïse Le Grand est écoulée sur sa ferme en vente directe. L’éleveuse a aménagé un magasin où elle organise des ventes tous les quinze jours. Elle propose aussi d’autres produits locaux dont des légumes, des chips, du miel ou de la bière.
La clientèle est principalement locale puisqu’elle vient d’environ une dizaine de kilomètres à la ronde. « Je vois arriver de plus en plus de jeunes parents soucieux de la qualité de l’alimentation pour leur famille, souligne Eloïse Le Grand. Plus globalement, la moitié de la clientèle vient pour chercher du produit fermier et l’autre moitié pour le label bio ».
La jeune femme tient à développer une relation de confiance avec ses clients. Lors des ventes, elle autorise la visite de la ferme puisqu’elle élève aussi pour son plaisir personnel quelques moutons, chèvres et lapins. Elle tient une page Facebook très suivie et appréciée de sa clientèle où elle partage son quotidien et organise des journées portes ouvertes ainsi que des pique-niques à la ferme. « Il faut ouvrir les fermes, échanger avec les gens, partager notre quotidien… et miser sur la jeune génération pour faire redécouvrir le monde agricole. Il y a un gouffre entre nous et la société. Et l’agribashing, c’est à cause de ça ! » Cette année, Eloïse Le Grand a déjà reçu quelques écoles, des crèches et même des enfants en situation de handicap.
À partir de septembre, la jeune éleveuse accueillera une apprentie pour la seconder dans son activité et développer encore davantage tous ses projets.
Marine Guillaume