Le « Brexit », sombre perspective pour les agriculteurs britanniques
Alors que le président du Conseil européen vient de proposer un compromis sur l’appartenance du Royaume-Uni à l’Union, une étude britannique avertit que les agriculteurs du pays ne tireraient aucun avantage d’un « Brexit ».
Donald Tusk, le président du Conseil européen, a rendu publiques le 2 février ses propositions de réforme pour inciter le Royaume-Uni à rester dans l’UE, alors que se profi le, pour la fi n du mois de juin, le référendum promis par le premier ministre britannique sur la relation de son pays avec l’Union. Devant tenter de convaincre David Cameron sur quatre demandes précises – l’intégration de la zone euro et la gouvernance économique, la compétitivité, la subsidiarité et les prestations sociales des travailleurs migrants européens –, il a estimé que ses pistes de travail allaient réellement « loin » pour remédier à toutes les préoccupations soulevées par Londres.
Les chefs d’État et de gouvernement des Vingt-huit en débattront les 18 et 19 février à Bruxelles.
Pas de plan B
Si le syndicat agricole britannique NFU n’a pas voulu jusqu’à maintenant se prononcer sur un « Brexit » – la sortie du Royaume-Uni de l’UE - , une étude universitaire commandée par la Yorkshire Agricultural Society et publiée le 4 février conclut qu’un tel cas de fi gure n’aurait que des inconvénients pour l’agriculture britannique.
Auteur de l’étude, avec le Farmer-Scientist Network, Wyn Grant, professeur à l’université de Warwick, juge diffi cile de voir un quelconque avantage à quitter l’UE pour les agriculteurs britanniques. En cas de vote « pour » lors du référendum, l’absence de plan B au niveau du gouvernement ouvrirait inévitablement une période de grande incertitude pour au moins deux ans, le temps qu’un nouveau système prenne forme, rendant extrêmement diffi cile la planifi cation à moyen et long terme des investissements des exploitants, estime-t-il.
Maintien de la charge administrative et perte de compétitivité
La plupart des agriculteurs britanniques s’inquiètent surtout de l’impact d’un « Brexit » sur les aides de l’UE, sans lesquelles l’avenir de nombreuses exploitations serait en péril, souligne l’auteur de l’étude.
« Le sentiment prévaut dans le secteur que quitter l’UE allègerait la charge administrative, constate-t-il aussi. Je ne pense pas que celle-ci disparaîtrait car le problème ne vient pas que de Bruxelles mais aussi de la sur-réglementation de Londres. Il y a des complexités juridiques qui n’ont pas été prises en considération ».
De plus, remarque Wyn Grant, le Royaume-Uni serait tenu de respecter les règles de l’UE s’il veut continuer à exporter en Europe. L’instauration probable de droits de douane sur les marchandises britanniques et les contrôles aux frontières auraient un impact, rendant les exportations plus chères.
« Saut dans l’inconnu »
Directeur général de la Yorkshire Agricultural Society, qui a commandé l’étude sur les conséquences d’un « Brexit », Nigel Pulling parle d’un « saut dans l’inconnu ». « S’il y a quelque insatisfaction avec l’Europe, il y a au moins une sécurité. Ce que ce rapport a mis en évidence, c’est la complexité des questions qui nous sont posées, et le gouvernement n’a répondu à aucune d’elles », remarque-t-il.
Selon lui, « une vraie inquiétude, c’est que dans une négociation, l’agriculture souffrirait comparé aux autres secteurs tels que les services financiers et l’industrie pharmaceutique qui contribuent plus au PIB britannique, et qui pourraient être jugés plus importants que ce que nous mangeons ».
De son côté, Richard Findlay, agriculteur du Yorkshire, rappelle que « dans la plupart des pays où il n’y a pas de soutien agricole direct, l’alimentation est plus chère ». « Il est erroné de dire que c’est une subvention agricole, ce ne l’est pas, elle subventionne le coût de l’alimentation dans les rayons », affirme-t-il. « Tout le monde doit manger, et les prix augmenteraient ».