L'accès à l'eau en péril : FNSEA et JA CVL manifestent à Orléans
Le deuxième acte des manifestations de la FNSEA et JA s'est tenu vendredi 29 novembre devant l'Agence de l'eau Loire-Bretagne à Orléans (Loiret). Les agriculteurs sont venus dire stop aux « incohérences qui entravent l’agriculture ».
Le deuxième acte des manifestations de la FNSEA et JA s'est tenu vendredi 29 novembre devant l'Agence de l'eau Loire-Bretagne à Orléans (Loiret). Les agriculteurs sont venus dire stop aux « incohérences qui entravent l’agriculture ».






Après avoir allumé des feux de la colère dans leur département respectif il y a moins de deux semaines, les adhérents de la FNSEA et des JA de la région Centre-Val de Loire se sont cette fois-ci tous réunis vendredi 29 novembre à Orléans, devant l'Agence de l'eau Loire-Bretagne. Organisée par la FNSEA et JA Centre-Val de Loire, cette manifestation a rassemblé une vingtaine de tracteurs et près d'une centaine d'agriculteurs, tous venus protester contre les études HMUC (Hydrologie, milieux, usages et climat), le Sdage* Loire-Bretagne 2022-2027 qui les crée, la Stratégie d’évaluation des volumes prélevables qui les rend obligatoire, l’Arrêté d’orientation Loire-Bretagne qui les utilise pour durcir la gestion de la sécheresse, et le 12e programme de l’Agence de l’eau qui conditionne l’octroi des aides à l’adaptation à ces études.
Remettre l'humain au centre des préoccupations
Les agriculteurs se sont rassemblés dès 10 heures devant l'Agence de l'eau, apportant avec eux d'anciens matériels agricoles pour symboliser la fin de l'accès à l'eau en agriculture. Une heure plus tard, le nouveau directeur de l'organisation de protection de l'environnement, Loïc Obled, a reçu une délégation d'une petite dizaine de représentants syndicaux. Parmi eux, Sébastien Méry, président de la FNSEA 45 et membre du bureau des Irrigants de France, et Nicolas Sterlin, président de la FNSEA Centre-Val de Loire. Ce dernier a dévoilé les grandes lignes de ce qui a été dit au cours de ces deux heures d'échanges : « Notre objectif était clair : remettre l'humain, les agriculteurs, leurs exploitations, ainsi que l'avenir des jeunes qui s'installeront, au centre des préoccupations ».
Une étude d'impact socio-économique demandée
Une des principales revendications portées par la délégation est d'intégrer la dimension économique dans les études HMUC. Il a été rappelé que derrière chaque prélèvement en eau, il y a une réalité économique et humaine indissociable de la survie des exploitations agricoles. « Nous avons également demandé auprès de la préfecture qu'une étude d'impact socio-économique soit lancée en parallèle du lancement d'une étude HMUC, a précisé Nicolas Sterlin. Cette étude d'impact socio-économique ne pourra pas être différée et devra être financée par l'Agence de l'eau ». D'après le président de la FNSEA Centre-Val de Loire, l'Agence de l'eau a d'ores et déjà confirmé qu'elle sera la financeuse de ces études. « Malgré cette approbation, il faudra continuer à exercer une pression sur les autorités pour garantir son financement », a tout de même prévenu le président.
Prélèvements en basses eaux : une mensualisation évitée
Un autre point de discussion a été l'absurdité des prélèvements en basses eaux, qui, sur certaines Commissions locales de l'eau (CLE), pourraient être mensualisés. La délégation a obtenu l'assurance de la préfecture que cette mensualisation ne serait pas appliquée, même si la période exacte de prélèvement reste à définir. L'idéal pour les agriculteurs serait une seule période de prélèvement, d'avril à octobre.
Nicolas Sterlin a aussi pris l'initiative d'inviter Loïc Obled à venir sur le terrain, visiter des exploitations agricoles et constater par lui-même que sans eau, il n'y aurait plus d'agriculture en Centre-Val de Loire. Cette invitation vise à sensibiliser le directeur de l'agence à la réalité du terrain et à la nécessité urgente de solutions adaptées.
Vers des chantiers de substitution ?
Enfin, Nicolas Sterlin a conclu son intervention en évoquant les « chantiers de substitution » à venir, soulignant qu'il y aurait moins d'eau à prélever dans les milieux naturels, que ce soit dans les rivières ou dans les forages. « Il est crucial de développer des réserves de substitution pour pallier cette diminution des ressources », a-t-il rappelé. Cependant, le processus administratif lié à la mise en place de ces réserves est très long, avec des autorisations qui peuvent prendre jusqu'à vingt ans à obtenir. D'où l'urgence de commencer dès maintenant à réfléchir et à mettre en œuvre des solutions. « Il est indispensable de ne pas se laisser abattre, malgré les obstacles et la lenteur des procédures administratives », a-t-il terminé avant de laisser la parole aux autres membres de la délégation.
*Schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux.
Interview Sébastien Méry
« Les actions de cet automne ont apporté des annonces qui vont dans le bon sens, mais leur mise en place rapide est attendue »

Le président de la FNSEA 45, Sébastien Méry, fait un point d’étape sur les actions menées depuis cet automne.
Pourquoi avoir choisi l’Agence de l’eau, à Orléans, pour manifester vendredi 29 novembre ?
Sébastien Méry : Les premières actions ont commencé sur le pont de l’Europe, pour symboliser l’Europe des normes, l’Europe des contraintes, avec un message : n’importons pas l’alimentation que nous ne voulons pas. Les Agences de l’eau sont souvent vues comme un État dans l’État. Elles symbolisent les entraves qui pèsent sur notre métier. Nous avons choisi de dire stop aux incohérences et aux aberrations françaises. Les dernières études HMUC* menées par l’Agence de l’eau Loire-Bretagne oublient les aspects sociaux économiques. Sous couvert de priorisation des usages, l’Agence souhaite hiérarchiser les usages pour demain interdire les usages de l’eau.
Les actions de cet automne donnent-elles des résultats ?
Après la dissolution de l’Assemblée nationale, beaucoup de mesures sont restées en attente. La pression mise par la FNSEA et JA continue à produire des résultats. Cette semaine, le contrôle unique sur les exploitations sera signé avec la préfecture du Loiret. Les réglementations sur les jachères ont été assouplies, des aides exceptionnelles pour la crise FCO-3 ont été obtenues, comme bien d’autres évolutions. Le projet de loi de finances** contient de nombreuses avancées comme le maintien du dispositif TODE, le calcul des retraites sur les 25 meilleures années, des mesures sur les DEP (Déduction pour épargne de précaution), l’augmentation du taux d’exonération de la TFNB (Taxe sur le foncier non bâti) et la conservation du taux réduit de taxe sur le GNR.
La ministre de l’Agriculture est venue dans le Loiret samedi dernier. Quelles sont ses annonces ?
Nous avons accueilli avec plaisir la ministre Annie Genevard sur l’exploitation de Jean-Louis Lefaucheux, secrétaire général de la FNSEA 45, à Sully-sur-Loire. J’ai trouvé une ministre à l’écoute des agriculteurs, qui a rappelé la nécessité de produire et que l’eau et les moyens de production sont indispensables à l’agriculture. Elle est consciente du fardeau administratif que les agriculteurs subissent. Les annonces vont dans le bon sens : révision de la directive Nitrates, simplification de l’instruction réglementation ICPE (Installations classées pour la protection de l’environnement), priorisation des travaux de l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail) et paiement des acomptes Pac. Les annonces sont là, maintenant il faut les concrétiser pour qu’elles soient perceptibles dans nos cours de fermes.
Qu’attendez-vous du gouvernement et des administrations ?
Nous attendons la mise en place rapide de toutes les annonces. Les prêts garantis par l’État annoncés il y a plus de trois semaines ne sont toujours pas actifs. Toutes les promesses du printemps ne sont pas concrétisées. Je demande à nos dirigeants d’examiner les 34 propositions de simplification faites par la FNSEA et JA. Leur mise en place est simple, elle passe par des décrets ou des circulaires à la disposition des ministres. Il faut une vision claire pour l’agriculture et donner de la liberté d’entreprendre pour toutes les filières.
Quelles sont les prochaines actions ?
Pour l’instant, il n’y a rien de précis. Mais le sujet sera le revenu. Les négociations commerciales entre les entreprises agroalimentaires et les grandes surfaces ont commencé. L’agriculteur ne doit pas être la valeur d’ajustement. Les moissons catastrophiques et les problèmes sanitaires dans les élevages ovins et bovins ont fragilisé les agriculteurs, nous demandons à l’État de réagir rapidement.
Propos recueillis par la FNSEA 45
*Hydrologie, milieux, usages et climat.
**À l'heure où nous bouclons ces lignes, l’examen de la motion de censure déposée à l'Assemblée nationale n’est pas réalisé. Si la motion de censure est validée, le projet de loi de finances sera reporté.