Carburants : situation critique
Les conséquences de la crise sociale sur les approvisionnements en carburants se font encore sentir cette semaine aux quatre coins du département. Regards croisés de trois Jeunes agriculteurs confrontés à la pénurie.
Les conséquences de la crise sociale sur les approvisionnements en carburants se font encore sentir cette semaine aux quatre coins du département. Regards croisés de trois Jeunes agriculteurs confrontés à la pénurie.
Remplir le réservoir est un geste anodin qui ne l’est plus pour de nombreux agriculteurs loirétains à la suite des pénuries, partielles ou complètes, en cours pour près d’un tiers des stations-service et fournisseurs, impactés par le blocage des raffineries et dépôts pétroliers français. Une panne sèche ressentie plus ou moins difficilement en fonction de l’activité dans les fermes du département. Un constat partagé par Gabriel Beaulieu, agriculteur à Cléry-Saint-André et président de Jeunes agriculteurs Loiret : « Clairement, quand on commande aujourd’hui du carburant chez un fournisseur, on nous annonce que les commandes seront livrées au 15 novembre avec un maximum de 1 000 litres par livraison. À titre personnel, j’ai commandé 5 000 litres il y a trois semaines. La première livraison devait intervenir vendredi dernier mais elle a finalement été annulée. Finalement, le stock demandé sera livré en cinq fois. La situation est compliquée pour tout le monde car même CTO, filiale du groupe Total énergies, me dit que seulement 20 % des stocks habituels sont disponibles. Et la tendance est la même chez tous les fournisseurs ».
Crise durable et anticipation
Une pénurie encore plus difficile à gérer dans un contexte d’augmentation des prix continue depuis le premier trimestre 2022. « Avant cette crise, on négociait le litre à 96 centimes, aujourd’hui on est plutôt autour d’1,20 euro hors taxes, témoigne Gabriel Beaulieu. Certains adhérents en ont même acheté à 1,40 euro sans se poser de questions. Ce qui est rassurant, c’est que les dépôts pétroliers ont en grande partie rouverts, notamment celui de Saint-Jean-de-Braye, même si pour le moment les livraisons ne suivent pas. Nous sommes beaucoup à être dans les semis ou dans les récoltes. Les arracheurs de betteraves ont besoin de 800 litres de GNR en moyenne par jour. La situation peut être tendue pour certaines exploitations, notamment pour les éleveurs qui ont besoin de nourrir les animaux et donc de tourner la clé du tracteur tous les jours. Le syndicat reste vigilant sur cette situation ».
Travaux adaptés
Son de cloche similaire à Chevry-sous-le-Bignon pour Edouard Caekaert, éleveur de vaches à viande dans le Gâtinais :
« On a tous peu de stock et on travaille à flux tendu en empruntant du carburant chez les voisins pour pouvoir tourner. Concrètement, il y a quinze jours, au début des semis, certains ont été à l’arrêt faute d’approvisionnement. De mon côté, j’ai été ravitaillé vendredi dernier mais ma prochaine livraison n'aura lieu que le 7 novembre. On essaye tous d’adapter nos activités dans les champs pour passer le cap. C’est peut-être symbolique aussi, mais à la ferme on nourrit désormais les animaux à la main pour éviter de démarrer la machine. Cela nécessite de travailler un peu plus », relève celui qui est par ailleurs secrétaire général du syndicat pour le département.
À Greneville-en-Beauce, Martin Beauvallet tire les mêmes conclusions : « Je ne suis pas embêté car j’ai rempli ma capacité totale fin septembre, attiré par le prix proposé à l’époque. J’en avais de toute façon besoin pour arracher mes betteraves, j’ai eu un peu de chance. Par contre, j’ai des collègues qui aujourd’hui font très attention aux travaux qu’ils font ou ne font pas. Certains repoussent même les semis. C’est délicat car dans le nord-Loiret, les délais de livraison sont de trois semaines à un mois », conclut l’exploitant et trésorier de Jeunes agriculteurs Loiret.