Betteraves Deleplanque : ces nouvelles variétés qui permettent d'espérer
Alors que la filière betteravière est en plein chaos en raison de l'arrêt des néonicotinoïdes, le semencier yvelinois Deleplanque annonce l'arrivée de six nouvelles variétés tolérantes à la jaunisse.
Alors que la filière betteravière est en plein chaos en raison de l'arrêt des néonicotinoïdes, le semencier yvelinois Deleplanque annonce l'arrivée de six nouvelles variétés tolérantes à la jaunisse.
Alors que la filière betteravière est en plein chaos en raison de l'arrêt des néonicotinoïdes, le semencier yvelinois Deleplanque annonce l'arrivée de six nouvelles variétés tolérantes à la jaunisse.
À quelques jours du début des semis de betteraves dans la région Île-de-France, les planteurs retiennent leur souffle, et tremblent pour la campagne chaotique qui les attend très probablement. Plongée en plein désarroi depuis l'annonce de l'arrêt des dérogations néonicotinoïdes, la filière betteraves connaît en effet des heures difficiles et incertaines. En l'absence de protection des semences, quid en cas d'attaques massives de pucerons cette année ?, les traitements foliaires montrant à ce jour une efficacité toute relative selon les circonstances. Tandis que Tereos annonçait la semaine dernière son intention de fermer la sucrerie d'Escaudœuvres (Nord), c'est toute une filière qui menace de s'écrouler à l'échelle nationale.
Chez Deleplanque pourtant, on garde le sourire, et l'espoir. Le semencier yvelinois travaille d'arrache-pied depuis plusieurs années sur cette problématique jaunisse et, à la veille de cette campagne 2023, les nouvelles sont plutôt bonnes. Deleplanque annonce en effet avoir mis au point plusieurs variétés de betteraves « tolérantes à la jaunisse ». « Nous intégrons à notre catalogue six nouvelles variétés tolérantes à la jaunisse, explique le directeur de l'activité betteraves, Maxime Bouton. Yellowstone est d'ores et déjà inscrite en Allemagne et la reconnaissance officielle de sa tolérance constitue une première en Europe. Cinq autres variétés (Galibier, Stromboli, Congo, Tourmalet et Olympe, NDLR) ont été retenues au CTPS* France ».
Perte de rendement minimisée
L'annonce de l'arrivée prochaine de ces nouvelles variétés tombe à point nommé dans ce contexte particulièrement inquiétant. Pour leur inscription officielle, Deleplanque doit cependant montrer patte blanche sur de nombreux critères et notamment celui du rendement en situation infestée. Une variété tolérante jaunisse qui n'offrirait qu'un faible rendement en cas d'exposition au virus n'aurait en effet qu'un intérêt très modéré. Là encore sur cette question, le semencier se veut rassurant : « Le critère du rendement en cas d'exposition au virus a évidemment été un point d'attention important pour nous, rassure d'emblée Maxime Bouton. Les six variétés ont montré leur capacité à sécuriser le rendement à hauteur de 85 % de leur potentiel initial en situation d'inoculation artificielle, c'est-à-dire dans des conditions extrêmes qu'on ne trouvera qu'exceptionnellement en conditions réelles ». À noter que le potentiel initial, en situation non infestée, desdites variétés correspond aux variétés témoins du marché. Et Maxime Bouton de préciser : « Ces nouveautés sont tolérantes aux trois virus de la jaunisse, BCHV, BMYV et BYV, le plus virulent, et combinent également une résistance à la rhizomanie, à la cercosporiose et aux nématodes ». De quoi susciter un réel espoir pour les années à venir.
Méthode de travail inédite
Si ces nouvelles variétés ont pu voir le jour si rapidement, c'est en grande partie grâce aux lourds moyens déployés par Deleplanque depuis 2019-2020 à travers son programme de recherches variétales Modefy. À une petite centaine de kilomètres de son siège historique de Maisons-Laffitte (Yvelines), c'est à Estrées-Saint-Denis (Oise) que le spécialiste de la betterave a installé sa station expérimentale, et que tout s'est joué. « La pression jaunisse existe depuis de nombreuses années mais nous avons observé un tournant depuis 2020 avec un climat plus doux en hiver et plus chaud et sec en été, une combinaison malheureusement favorable au développement des pucerons virulifères, reprend Maxime Bouton. Nous avons mis sur pied — avec l'appui financier des Régions Île-de-France et Grand Est — ce programme Modefy qui nous a véritablement permis d'accélérer la recherche ».
Deleplanque a alors fait le choix d'une méthode de travail quasiment inédite en France : élever ses propres pucerons virulifères et pratiquer l'inoculation au champ au stade 2 ou 3 feuilles. « Les pucerons sont élevés sous serre dans des petites tentes à insectes appelées Bugdorm, explique Romain Vichard, ingénieur dédié sur le programme Modefy. Dans chaque rangée, nous élevons des pucerons porteurs d'un des virus de la jaunisse, nous pratiquons des tests PCR régulièrement pour nous en assurer. Au mois de mai, vient l'inoculation au champ sur les 3 500 micro-parcelles réservées aux essais jaunisse. Les feuilles des betteraves infestées en Bugdorm sont directement agrafées sur les plantes au champ avec en moyenne dix pucerons inoculés par plante et nous procédons à cette opération sur 3 à 10 % des plantes de chaque parcelle. En quelques heures, toutes les plantes sont infestées, c'est une situation vraiment extrême ».
Les ingénieurs du semencier ont ainsi testé, depuis 2020, des milliers de génotypes différents pour aboutir à ces six variétés prometteuses. Toutes intègrent dès ce printemps les essais de l'Institut technique de la betterave et devraient être commercialisables au printemps 2024.
*Comité technique permanent de la sélection des plantes cultivées.