À Wrocław, des lutins plein les rues
De petits personnages en bronze essaiment sur les trottoirs de Wrocław (Pologne). Ils sont à la fois les ambassadeurs malicieux de la ville et une évocation de son passé.
Wrocław sera la capitale européenne de la culture en 2016. Cette ville du sud-ouest de la Pologne a de quoi intéresser et surprendre : marquée par de nombreux changements de nom et de statut national*, influencée par diverses communautés culturelles et religieuses, riche d’imposants musées et édifices religieux, « Venise du nord »,…
Mais ce qui attire tout de suite l’œil quand on arrive à Wrocław, ce n’est ni la cathédrale gothique, ni les plus de cent vingts ponts qui enjambent l’Odra et ses affluents.
L’attraction de la ville, c’est un petit peuple à barbe et en bronze. Les Polonais les appellent « krasnales », en français disons qu’ils tiennent du lutin et du gnome.
Leurs bouilles joviales ou concentrées parsèment depuis dix ans les rues de Wrocław. Certains se reposent, d’autres lisent, mangent, travaillent, font de la musique ou du sport…
Plus qu’une curiosité rigolote pour les touristes et les enfants, ces lutins sont aussi un rappel du climat politique du pays dans les années 1980.
Le mouvement contestataire « Alternative orange » a été lancé en 1981 par des étudiants de Wrocław. Il jouait la carte de l’absurde pour réveiller l’esprit critique de la société polonaise et ridiculiser le régime communiste : entre autres happenings, les membres d’ « Alternative orange » peignaient des lutins sur les murs des villes.
Les autorités ont décidé de rendre hommage à ce mouvement en 2001 en érigeant un premier nain, Papa Krasnal, là où le groupe avait l’habitude de se réunir. Cinq autres ont suivi en 2005, œuvres de l’artiste local Tomasz Moczek.
Depuis, il fleurit chaque année de nouveaux gnomes dans les rues de Wrocław. Impossible de connaître leur nombre exact, mais d’après le site www.krasnale.pl qui les répertorie, ils seraient aujourd’hui plus de trois cents.
*Fief de la dynastie Piast, puis du royaume de Bohème, des Habsbourg, de la Prusse, de l’Empire germanique, du troisième Reich avant de revenir à la Pologne en 1945, Wrocław s’est successivement appelée Vratislava, Wrotizla, Wrestlaw, Vraclav, Vrestlav, Prezlav, Presslaw, Bresslau et Breslau.
Photos : H.S. et L.S.