L'innovation participative est un modèle managérial qui s'adapte
Une rencontrée organisée par l'Aritt présentait une méthode de gestion managériale mise en oeuvre dans l'industrie agroalimentaire.
L'innovation participative : un nouveau mode de management pour motiver vos équipes ? C'était le thème de la rencontre organisée le mercredi 29 octobre à Orléans par l'Agence régionale pour l'Innovation et le Transfert de Technologie (Aritt). Chargé de mission à l'Agence régionale pour l'Amélioration des Conditions de Travail (Aract), Nicolas Bienvenu définit le concept : « Une démarche structurée de management qui vise à améliorer et à favoriser l'émission, la mise en oeuvre et la diffusion d'idées par l'ensemble du personnel pour porter un projet et créer de la valeur ajoutée. »
Cela suppose un certain nombre de conditions : un engagement de la direction de l'entreprise et de l'encadrement intermédiaire (une écoute bienveillante des autres et une attention particulière au sentiment de perte de pouvoir), un bon climat social, une réactivité des participants et une démarche qui s'inscrit dans la durée. La méthode peut concerner tous les aspects de la vie de l'entreprise : la productivité, le service, l'environnement, la maîtrise des flux, la qualité, la sécurité ou les conditions de travail. L'intérêt ? « De nouveaux avantages concurrentiels. Or la démarche étant interne à l'entreprise, elle n'est pas vue par la concurrence. » Nicolas Bienvenu a ajouté : « Il s'agit de remettre l'homme au coeur de l'entreprise. » Une revalorisation du travail alors que la mondialisation conduit à optimiser les coûts. Donc à délocaliser.
Anne Vermès dirige Traits d'Unions, une structure qui aide les entreprises autour de la gestion des transformations avec, comme fil conducteur, tirer le meilleur des hommes. Ces derniers sont dotés d'une intelligence cognitive et d'une intelligence émotionnelle. « Et l'addition des deux conduit à l'intelligence de l'action. » L'intervenante a expliqué que l'innovation participative n'était pas un concept nouveau puisque Nicolas Fouquet y eut recours au dix-septième siècle lors de la construction du château de Vaux-le-Vicomte (Seine-et-Marne) : « Il a utilisé les contraintes pour innover, lançant le siècle des Lumières et l'industrie du luxe à la française. Il a su aller chercher le meilleur des hommes et les mailler les uns avec les autres : financiers, architectes, artistes, etc. Un homme qui avait une vraie vision. Son credo était le suivant : sortez des cadres habituels et des schémas de pensée préétablis ! Nicolas Fouquet n'eut qu'une seule faiblesse : il ne vit pas le pouvoir absolu de Louis XIV, ce qui conduira ultérieurement à sa chute. »
Une progression de 10% par an
L'innovation participative a été mise en oeuvre au sein du groupe Poult, leader français des biscuits sous marque distributeur, dont la biscuiterie Rougier de Sully-sur-Loire constitue l'une des unités de production. « Nous sommes sur un chemin et il y a encore des choses à faire » a déclaré Emmanuel Schott, animateur du site sullylois. En 2007, l'entreprise se trouvait en perte de vitesse : une gamme de produits vieillissante et une démotivation générale. « Or aucun salarié n'était démotivé lorsqu'il a intégré l'entreprise. C'est donc celle-ci qui a produit le phénomène. »
Les causes étaient de trois ordres : un manque d'initiative accordé à chaque salarié, un manque de reconnaissance (qui ne passe pas uniquement par la fiche de paye) et un manque de consultation pour les décisions. Cela s'expliquait par une hiérarchie hyperstratifiée : « Un pouvoir de dire oui faible mais un pouvoir de dire non colossal. Conséquence : seule une initiative sur dix se concrétisait. » Autre élément à prendre en compte : « Une valorisation des managers en hypercontrôle. » D'où le peu d'initiative laissé aux collaborateurs.
« Les modifications dans l'organisation de l'entreprise et le mode de management ont été décidées de façon collaborative et partagée avec l'ensemble du personnel. » Conséquences : une réduction des niveaux hiérarchiques, une multiplication des collectifs de prise de décision et une modification du rôle des responsables hiérarchiques, qui sont devenus des managers-accompagnateurs. « Impliquer l'ensemble des collaborateurs, c'est les faire grandir » a déclaré Emmanuel Schott.
Après une période de tâtonnement de quelques mois, « une spirale positive » s'est engagée : amélioration des performances de l'entreprise au-delà des niveaux initiaux, système participatif d'amélioration continue, réduction de l'absentéisme et meilleure prise en main des projets. « La parole se libère toute l'année et non sur un projet. (...) La démarche n'a pas plu à tout le monde : les managers ont dû laisser une partie de leur pouvoir et accorder le droit à l'erreur aux équipes. Les résultats amènent l'autonomie. » En trois ans, le groupe Poult a augmenté sa part de marché de 6 % sur un segment globalement stagnant et son chiffre d'affaires progresse de 10 % par an. « L'innovation participative est un modèle managérial qui s'adapte en permanence : une évolution loin d'être achevée ! »