Le fonds Garola mis à l’abri
La conservation du fonds historique exceptionnel des cartes pédologiques dressées par Charles-Victor Garola en 1892 vient d’être assurée.
Charles-Victor Garola porte un prénom qui fleure bon la Troisième république, ses encriers dans les écoles de Jules Ferry, ses moustaches à l’impériale.
Jeune ingénieur protestant, il fait partie de la première promotion de l’Institut national agronomique. Il est envoyé en 1883, par le ministère de l’Agriculture, dans un département pour diffuser la science agricole auprès des paysans. Il arrive à Chartres (Eure-et-Loir) où il occupe la chaire d’agriculture fondée par le conseil général.
Militant du progrès, il ne croit qu’à la science.
C’est cette conviction qui lui a donné la force de mener un chantier colossal : dresser la carte de tous les sols de l’Eure-et-Loir pour y écrire les recommandations de fumure. Au passage, il participe à l’invention de la carte pédologique.
[CORRECTIF] Après la publication de cet article, un lecteur a réagi pour apporter une précision. Il ne s’agit pas de cartes pédologiques au sens strict « puisque les travaux de Dokuchaev étaient encore inconnus en France à l’époque et les concepts restaient antérieurs. Il s’agit de cartes “agrologiques” dans l’esprit de la pensée d’Eugène Risler (= géologie agricole). Comme il est dit dans l’article, les limites étaient les limites de la carte géologique et les contenus interprétés sur la base d’échantillons de terre envoyés par les instituteurs (c’était l’époque où ceux-ci étaient mobilisés sur la question par Georges Ville et sur ordre du gouvernement, ce jusqu’en 1870) ! Sur ces cartes, les terres étaient qualifiés de silico-argileuses , argilo-calcaires, etc., en relation avec les données fournies par les analyses réalisées alors. Ces appellations sont restées dans les esprits, en particulier dans le monde viticole. » Vous pouvez en savoir plus en vous référant à ce lien.
Pour réaliser ce projet, il a besoin de réunir plusieurs éléments. Déjà, un cadastre. Il demande aux instituteurs, références locales de la connaissance, de lui adresser un calque du cadastre de chaque commune. Ensuite, une carte géologique pour tracer des grands ensembles.
Et, enfin, des agriculteurs. Les instituteurs, à nouveau, réunissent les exploitants, connaisseurs du terrain, pour qualifier chaque grand ensemble de sols : sa profondeur, sa perméabilité, etc. Ils envoient tous ces relevés et des échantillons de sols à Charles-Victor Garola qui les compile dans un ensemble de quatre cents cartes colorées qui avaient été affichées dans les mairies.
Ce fonds historique exceptionnel est entre les mains de la coopérative Scael qui vient de signer un accord de conservation avec les Archives départementales.
Bien que représentant de l’administration, Charles-Victor Garola avait adhéré au syndicat agricole de Chartres (qui a donné la Scael au fil du temps) pour assurer la diffusion de la science agricole auprès des praticiens.