« Une année atypique »
Frédéric Cadoux est conseiller en grandes cultures à la chambre d’Agriculture.
« Depuis le 15 mars, nous n’avons pas pu organiser de tour de plaine physique. Or nous voulons conserver le lien avec les agriculteurs et leur permettre d’échanger entre eux, ce qui est un principe de base des Groupements de développement agricole. Dans ce but, nous avons mis en place des audioconférences. Nous donnons rendez-vous aux exploitants une fois par semaine. Selon les conseillers, nous faisons cela à différents horaires. Pour ma part, c’est en début de matinée. J’ai organisé trois réunions à des moments où les agriculteurs n’avaient pas trop de travail, notamment les traitements.
Normalement, un tour de plaine se déroule en deux temps : nous faisons un point d’actualité puis nous nous rendons dans des parcelles pour des observations. Actuellement, nous n’avons plus cette seconde phase. (…) Les préoccupations des agriculteurs concernent le temps sec, la gestion de la fertilisation azotée, des maladies et des ravageurs, notamment les pucerons, fortement présents ce printemps sur toutes les cultures. Ce sont des sujets classiques d’actualité, auxquels s’ajoutent les implantations et la précocité de la végétation. Sur ce point, nous vivons une année atypique : nous avons dix à quinze jours d’avance. (…)
Depuis le début de l’année, il n’y a quasiment pas eu de gel. On a déjà connu 25 °C en avril mais sur un jour ou deux. Là, depuis dix jours, nous avons des températures dignes d’un mois de juin. Si on fait un bilan climatique depuis le début de l’année, 2020 se caractérise pour le moment comme l’année la plus chaude depuis plus de quinze ans, avec en moyenne + 2 degrés par jour. Par ailleurs, depuis le 1er janvier, il y a près d’un jour sur deux avec du vent supérieur à 10 km/h. (…) Avoir des cultures précoces expose à des risques de gel en avril et mai, notamment pendant la période de méiose (phase clé qui détermine le futur nombre de grains). A priori, nous devrions passer à travers cette année. Par contre, la précocité évitera peut-être les coups de chaud en juin, à condition qu’on ait de l’eau. (…)
Nous sommes passés d’une saison des pluies qui a duré jusque début mars à une saison sèche. En huit jours, tout s’est asséché à cause du vent d’est et des fortes températures. Or, nos plantes ne sont pas habituées à ces changements brutaux. Point positif, le retour des pluies au cours des derniers jours (ces propos ont été tenus le 23 avril, NDLR), très variable selon les secteurs, devrait atténuer le stress hydrique, très marqué dans les sols superficiels, et limiter la casse. »
Propos recueillis par J.O.